VENISE
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilAccueil  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le Deal du moment : -50%
-50% Baskets Nike Air Huarache
Voir le deal
64.99 €

 

 Le Caffé Florian

Aller en bas 
+8
Annavera de Luca
Iago degli Albizzi
Orfeo Ciriaco
Graziella Rivieri
Muzio Barrozi
Matteo Salvanti
Elio Lacryma Adorasti
Pourpre
12 participants
Aller à la page : 1, 2, 3, 4, 5, 6  Suivant
AuteurMessage
Pourpre
Du Bout des Doigts
Pourpre


Nombre de messages : 557
Statut : Admin
Date d'inscription : 11/04/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMer 18 Mai - 0:58

Le Caffé Florian Florian7tl
Revenir en haut Aller en bas
http://loch-lurgainn-house.forumactif.com/
Elio Lacryma Adorasti
Prince - Ca'Adorasti
Elio Lacryma Adorasti


Nombre de messages : 753
Statut : Admin
Date d'inscription : 14/04/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMer 18 Mai - 19:58

[Ca'Adorati]

Elio salua distraitement plusieurs personnes de sa connaissance qui sortaient du Caffé Florian au moment où il y entrait.
La porte tenue ouverte pas un laquais laissait échapper la rumeur étouffée des conversations.

Le Prince pénétra dans l'atmosphère échauffée de la salle et balaya du regard le spectacle des banquettes de velours rouge et des nombreuses personnes attablées.
Les paravents peints et les lambris dorés donnaient au lieu une ambiance raffinée et propice au divertissement.
Un valet vint le débarasser de son long manteau et de son tricorne.
Puis il prit place à la table qu'il affectionnait, un peu en retrait par rapport au centre de la salle ce qui lui permettait d'observer les autres consommateurs sans être dérangé.

Le serveur habituel lui apporta comme chaque jour un verre de Commandaria le fameux vin de Chypre à la robe de poupre dont la bouche veloutée lui faisait toujours plisser les yeux de plaisir et la Gazetta Veneta qu'il aimait à parcourir.
Il croisa les jambes dans une attitude détendue et ota lentement ses gants
.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 0:18

[Ca'Grazziano]

Matteo avait marché de son pas sautillant, qui témoignait de sa vitalité et son énergie débordantes, jusqu'à la Place Saint-Marc. Il prenait de grandes inspirations pour bien emplir ses poumons de l'air frais et vivifiant qui le revigorait. Il aimait l'ambiance feutrée de la bibliothèque, mais une promenade à l'extérieur était beaucoup plus tonifiante pour son jeune corps.

Son estomac gronda alors. Matteo réalisa alors qu'à part la petite collation prise au palais di'Grazziano, il n'avait encore rien mangé de substantiel depuis son éveil. Si on avait pu représenter le jeune homme par un des sept péchés capitaux, on aurait bien sûr choisi la luxure... mais non sans avoir hésité sur la gourmandise. En effet, Matteo adorait presque autant les plaisirs de table que ceux du lit.

Bien qu'il n'ait encore exploré Venise, il avait retenu qu'un joli café était situé sur la Place Saint-Marc.

*Pourquoi ne pas joindre l'utile à l'agréable?* pensa-t-il.

Matteo s'engouffra dans le café, le vent faisant tourbillonner les pans de son manteau derrière lui. Ses yeux parcoururent la pièce à la recherche d'une personne à l'aspect assez intéressant pour l'occuper pendant son repas. Il repéra un homme grand et fort beau, au maintien noble et racé. Un aristocrate, très probablement. La curiosité de Matteo fut piquée. Il était étrangement fasciné par ce visage aux traits fins, hypnotisé par ces yeux d'une couleur ressemblant à celle du miel. Bien qu'une petite voix au plus profond de lui-même l'implore de ne pas s'approcher, il l'ignora, préférant se fier au sentiment plus fort qu'il ressentait: l'attirance.

Matteo avança à travers la pièce, se dirigeant vers la table de l'homme. Puis, une fois arrivé devant lui, il s'inclina courtoisement et lui fit son sourire le plus charmeur. Puis, il s'enquit à brûle-pourpoint:


« Monsieur, je remarque que vous êtes seul à votre table, tout comme je le suis. Me prendrez-vous pour un rustre si je m'invite à la vôtre? Je ne prendrai aucune offense à un quelconque refus... seulement une grande déception de ne pouvoir partager un moment avec un homme d'aussi agréable tenue. »

Il ne savait trop à quoi s'attendre de sa part, mais Matteo était un homme d'action, il agissait souvent sous le coup de l'impulsion, comme il considérait qu'il n'avait jamais rien à perdre, que d'autres occasions se présenteraient toujours.
Revenir en haut Aller en bas
Elio Lacryma Adorasti
Prince - Ca'Adorasti
Elio Lacryma Adorasti


Nombre de messages : 753
Statut : Admin
Date d'inscription : 14/04/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 1:38

Elio savourait avec bonheur ce moment de tranquilité.
Etre seul au milieu de l'agitation, comme séparé de la foule par une vitre était une chose qu'il appréciait assez.
Il n'avait jamais souffert de la façon presque craintive avec laquelle les gens l'observaient ni de leurs regards vite détournés quand ils recontraient l'éclat d'or de ses iris, s'en amusant plutôt.
La distance que tous semblaient respecter lui plaisait et il ne cherchait pas à attirer la sympathie.

La porte fut ouverte une nouvelle fois, et l'air froid du dehors s'engouffra à l'intérieur déclanchant un tollé provenant des tables les plus proches de l'entrée où les femmes généreusement décoletées s'emmitoufflèrent dans leurs châles brodés avec ostentation.
L'arrangement des paravents épargna au Prince le désagrément de la température et il put détailler le nouvel arrivant à loisir, tout en savourant avec délice son verre de vin aux reflets chatoyants.
Il s'agissait d'un jeune homme à la coiffure ébouriffée, dont le long manteau battit un instant comme une aile.

Le garçon observa l'assistance comme s'il cherchait quelqu'un et le regard d'Elio accrocha les yeux bleus.
Le jeune inconnu, tout sourire en avant, traversa alors la piece d'un pas dansant et s'arrêta à moins d'un mètre de sa table, et s'adressa à lui de façon certes courtoise mais avec cette sorte d'assurance insolente qui lui fit lever un sourcil
.

"Ma foi, Monsieur, je peux remarquer de nombreuses tables inoccupées et je doute que ma conversation vous amuse. Comme vous l'avez fait si justement remarquer, je suis assis seul à savourer ce vin de Chypre dans la quiétude de cet endroit que j'apprécie.."

Le ton froid s'adoucit légérement et un sourire ironique fit luire un court instant l'émail d'une dentition parfaite.

".. Cependant nous sommes à Venise, et l'hospitalité fait ici loi.."

D'un geste léger il désigna un siège, autorisant le garçon à prendre place à sa table.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 2:43

Matteo fut dépité par le refus qu’il essuya de la part du bel étranger. Dommage, il semblait d’un grand intérêt. La seule manière dont il s’était exprimé avec le calme olympien d’un homme possédant une parfaite maîtrise de lui-même, son verbe, ses manières ; celui de l’heureux détenteur d’une élégance naturelle. Puis, alors que Matteo formulait quelques mots d’adieux qui lui permettrait de se retirer avec quelque dignité, l’inconnu l’invita à s’asseoir. Le jeune homme expira une respiration qu’il avait inconsciemment retenue. Reprenant vite contenance, il répondit du tac-au-tac :

« J’espère, Monsieur, que je saurai faire en sorte que ma présence soit pour vous autre chose qu’une simple politesse par souci d’éthique à la ville de Venise. »

Tout en s’asseyant, Matteo détailla le visage de l’homme en face de lui. Il ne semblait pas y avoir que sa personne à admirer. La façon dont il avait maintenu le suspense jusqu’au dernier instant pour finir sur un coup de théâtre… C'était quelqu'un qui aimait jouer au chat et à la souris. L’homme de main sentit un frisson parcourir son épine dorsale. Quelque chose chez cet homme donnait l'impression à Matteo que pour une fois dans sa vie, ce serait lui qui serait la proie, et non le prédateur, comme il l’avait toujours été. Quel sentiment nouveau et follement excitant! Le jeune homme bénissait sa faim de l'avoir conduit ici, jusqu’à ce sombre inconnu au charme envoûtant.

Malgré tout, Matteo ne pouvait se défaire de ce sentiment étrange. Comme si l’étranger lui était en fait familier. Qu’il le connaissait depuis toujours, mais que jamais ils ne s’étaient rencontrés. Balayant avec agacement ces pensées troublantes, le jeune homme s’enquit :


« Vous semblez connaître Venise, Monsieur. Y résidez-vous depuis longtemps, ou n’êtes-vous que de passage ici? »

Une fois sa question posée, le garçon se cala dans son siège et se perdit dans la contemplation des yeux de son interlocuteur. Ils étaient différents de ceux de son Prince. Alors que ceux-ci étaient gris clair, le regard de l’inconnu était ambré et en forme d’amande, ajoutant à son apparence peu commune de par sa beauté et sa grâce. Secouant légèrement la tête, Matteo se gifla mentalement. Il était rare qu’il fusse captivé à ce point par quiconque. Il devrait prendre garde, ici à Venise, qui sait ce qui pouvait arriver? Mais comment ne pas être captivé par les yeux de l’étranger?
Revenir en haut Aller en bas
Elio Lacryma Adorasti
Prince - Ca'Adorasti
Elio Lacryma Adorasti


Nombre de messages : 753
Statut : Admin
Date d'inscription : 14/04/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 4:07

Elio observa le jeune homme à la dérobée pendant qu'il s'installait.
Ses mots révélaient une habitude à être apprécié qu'il trouva impudente.
Le Prince fit tourner lentement son vin dans son verre dans une attitude nonchalante, sans répondre.

Il avait conscience de la curiosité avec laquelle le garçon le dévisageait et se demanda un instant si cette façon de l'aborder, l'endroit qu'il avait choisi pour le faire et son apparent jeune âge ne trahissaient pas autre chose qu'un désir de conversation.
Il n'était pas sans ignorer que de nombreux rendez vous galants étaient donnés dans ce lieu et que courtisanes et mignons y guettaient leurs prochains pigeons comme fauves à l'affut.
Il semblait, du moins à première vue, que le jeune homme au sourire charmeur fut de ceux-là.

A peine le blondinet fut-il assis qu'il reprenait de sa voix claire, les mains en mouvement semblant deux oiseaux s'envolant et revenant sans cesse, battant l'air graçieusement tandis que les yeux bleus ne quittaient pas le visage de son interlocuteur.
Le Prince voyant se profiler un interrogatoire visant à se renseigner sur une possible fortune, répondit d'une voix indifférente, tandis que d'un hochement discret de la tête, il demandait au serveur de s'approcher
.

"Qui peut se vanter de connaître Venise ? Cette ville est un mystère et j'apprécie qu'elle le reste pour ses visiteurs d'un jour comme pour ceux qui y résident. Croyez-vous que vous prendriez autant de plaisir à ces lieux si vous saviez tout ce que cachent les paravents ?"

Il n'avait pas répondu à la question.
Sciemment
.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 4:27

Alors, voilà qui ajoutait à l’ambiguïté de cet intriguant personnage! Sa réponse paraissait lourde de signification et vide de sens, à la fois. La première qualité parce que cela traduisait son désir de ne pas révéler d’information sur lui-même. La deuxième, car il ne répondait aucunement à la question de Matteo. Si l’homme souhaitait éviter les questions du garçon, c’était raté, parce qu’au contraire, sa curiosité n’en était que plus émoustillée. Qu’est-ce que l’inconnu cherchait donc à cacher derrière ces grands yeux dorés? Cette conversation qui au départ lui semblait tout à fait anodine prenait des tournures très différentes de ce qu’il aurait pu imaginer…

Ne souhaitant pas se faire écarter si vite, Matteo répondit à la question par une nouvelle interrogation :


« Mais percer les secrets d’une toile d’intrigues aussi grande que celle de Venise, n’est-ce pas une quête passionnante? Pleine d’embûches, soit. À peine perdue, soit. Mais l’homme qui un jour y parviendra, quel sentiment d’accomplissement ressentira-t-il! Et le pouvoir qu’il tiendra en ses mains! »

Ses yeux brillèrent. À mesure qu’il parlait, ses mains décrivaient des arcs dans l’air, pour illustrer ses paroles. On lui avait parfois dit qu’il était étourdissant, d’autres trouvaient que ses gestes rendaient sa conversation plus vivante. Matteo s’en moquait. Il aimait seulement s’exprimer avec le plus d’éclat possible.

Quoiqu’il fasse, Matteo n’arrivait pas à arracher son regard du visage de l’inconnu. Il avait l’impression d’être un oiseau hypnotisé par un serpent et attendant d’être gobé. Que pensait-il en ce moment précis? Le garçon n’en avait pas la moindre idée. L’homme était impénétrable, rien dans son visage n’exprimait ce qu’il pensait réellement. Aussi énigmatique que ses réponses, en fait. Ce qui ne faisait, encore une fois, que le rendre plus attirant.
Revenir en haut Aller en bas
Elio Lacryma Adorasti
Prince - Ca'Adorasti
Elio Lacryma Adorasti


Nombre de messages : 753
Statut : Admin
Date d'inscription : 14/04/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 5:06

Elio posa son verre, et fixa son regard d'ambre sur le visage du jeune homme.
Les yeux intéressés ne cessaient de le dévisager et il était sur le point de remettre l'effronté à sa place, quand les mains qui s'etaient apaisées reprirent leur vol.

Le débit rapide, la voix légèrement haut perchée le firent sourire.
Il détailla à son tour les traits fins de son vis à vis tandis qu'il parlait et fut surpris de le trouver beau.
Il n'avait pas remarqué cela avant, contrarié qu'il était qu'on le dérangeat dans un moment qu'il s'accordait, un plaisir rare qu'il ne souhaitait pas partager fut-ce avec la plus charmante des compagnies.

Le garçon était surement très jeune si l'on en jugeait par la douceur enfantine de la peau, la tendre courbe des lèvres et la vivacité de ses gestes.
Gestes quelque peu feminins par leur grâce, de même que la façon dont il inclinait la tête à la fin des phrases comme pour faire pencher la balance de l'opinion dans son sens.
Pourtant, il dansait dans les yeux clairs une étincelle qui laissait penser à plus de maturité qu'on ne s'y attendait de prime abord.
Quelque chose aussi dans l'assurance avec laquelle il s'exprimait face à un inconnu rendait son âge difficilement appréciable
.

"Aimez-vous les intrigues et les manigances, Monsieur ? Peut-être la lecture de certains romans vous les rend attirants.. Il n'y a pourtant rien de bien noble dans ces jeux et le danger que l'on y cottoie est bien réel.."

Il s'accorda une pause, caressant du bout des doigts le cristal finement gravé de son verre.

"Le pouvoir n'est-il pas une chose futile et éphémère qui ne vous laisse en se retirant qu'un âcre goût de fiel ?"

Le serveur s'était approché et s'inclinait à présent à quelques pas de leur table, attendant comme il se devait que leur conversation fasse une pause pour proposer ses services.
Elio fit un signe lui permettant d'approcher.
Il se tut tandis que l'homme se penchait vers le blondinet
.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 5:37

Matteo eut un sourire entendu lorsque l’inconnu lui parla du danger qu’on courait à trop vouloir mettre son nez dans les affaires des autres… Le garçon se faisait un point d’honneur que de faire en sorte que les affaires des autres deviennent les siennes. Et jusqu’à maintenant, il s’en tirait sans trop de mal. L’homme devait croire, comme tous les autres, qu’il n’y avait rien d’autre que de l’innocence derrière son visage de chérubin. Ou bien, qu’il était insousciant, comme tous les jeunes. Qu’il n’en avait pas vu assez, que son expérience était trop maigre pour qu’il ait réellement pu soupeser ce à quoi il jouait. Et pourtant, et pourtant… Matteo devait avoir le même âge que lui. Il se plaisait dans son rôle d’éternel adolescent. On ne se méfiait jamais vraiment de lui, tout au plus, on craignait pour la pureté de ses enfants ou leur première initiation à la beuverie, mais sinon, Matteo Salvanti n’était qu’un gentil vaurien.

Par souci de conserver cette image, Matteo ouvrit de grands yeux innocents. Quelqu’un qui le connaissait bien aurait vu une lueur hypocrite danser dans son regard azur.


« Peut-être avez-vous raison, Monsieur. Mon esprit fertile s’embrase à la perspective d’aventures plus grandes que nature… mais que serait notre vie sans un brin d’imagination pour l’illuminer? »

Sa voix cristalline s’élevait dans l’air à mesure qu’il parlait.

« Le pouvoir, Monsieur? N’est-ce donc pas ce pourquoi tant d’hommes ont péri? Pour goûter ne serait-ce qu’à une infime seconde à cet amant traître et infidèle qu’est le pouvoir? »

Le garçon s’interrompit lorsque le serveur s’approcha de leur table. Il sourit à son interlocuteur puis, se voyant affamé, commanda un pâté de lièvre en croûte et du vin. Son attention revint ensuite à l'étranger. Il brûlait de connaître son identité, mais comme celui-ci l'avait lui-même souligné, une fois le voile soulevé, l'intérêt de Matteo subsisterait-il? Sans doute... car cet homme était exceptionnel. Le jeune homme était fortement impressionné par cet aura qu'il dégageait et il n'était pas prêt à se soustraire à son influence de sitôt.
Revenir en haut Aller en bas
Elio Lacryma Adorasti
Prince - Ca'Adorasti
Elio Lacryma Adorasti


Nombre de messages : 753
Statut : Admin
Date d'inscription : 14/04/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 6:15

Elio qui écoutait à présent le jeune homme avec plus d'attention, commençait de trouver étrange qu'un inconnu, qu'il avait tout d'abord pris pour un mignon en quête de bonne fortune, se soit assis à sa table pour lui tenir des propos sur le pouvoir et les intrigues qu'il supposait agiter la ville.
Les mines innocentes du garçon contrastaient fortement avec ses paroles, et les yeux grands ouverts ne parvenaient pas à le convaincre de sa naïveté.

Le Prince attendit que le serveur s'éloigne pour reprendre la parole
.

"Etes-vous de ces étudiants qui se réunissent en cercles politiques et passent leurs journées à refaire le monde ? Ou bien êtes-vous attaché à l'une de ces Maisons qui rivalisent d'influence, pour tenir pareil discours sur le pouvoir ?"

Lentement, avec un détachement affiché, Elio enfila ses gants de cuir et en attacha le bouton de jais.
Un nouveau signe de tête au serveur, demandant que le repas du jeune homme soit porté sur son compte et il déplia ses longues jambes.

Sa main glissa dans une petite poche de son justaucorps et au bout de ses doigts gantés apparut une petite carte de bristol armorié.
Il se leva, se pencha vers le garçon et glissa le petit carton dans sa main, son souffle effleurant les cheveux clairs
.

"Je donne un petit divertissement musical ce soir vers neuf heures. Si cela vous dit de confronter vos opinions à celles de mes hôtes.."

Il se redressa et un laquais lui apporta son manteau et son tricorne.
Après une légère inclinaison du buste et un sourire ironique, il tourna les talons et s'en fut
.

[Place Saint Marc - Sud]
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 19 Mai - 6:38

Matteo écouta l'homme stipuler sur son identité réelle avec un léger sourire. Il avait visé juste, il faisait bien partie d'une Maison. Et pas n'importe laquelle! La Maison di'Grazziano, qui bientôt, reprendrait la place qui lui convenait à Venise: celle du pouvoir, ce dont il avait parlé avec tant de passion, quelques instants plus tôt. Quant au rôle d'étudiant? Oui, en quelque sorte. Il avait toujours quelque chose à apprendre, c'était l'une de ses forces. Jamais il ne s'asseyait sur ses lauriers. Il lui fallait constamment innover, évoluer en quelque sorte.

C'est avec déception que le jeune homme vit l'étranger se lever. Un frisson lui parcourut tout le corps lorsqu'il sentit son souffle contre sa peau. Puis, la voix qui l'envoûtait, qui lui faisait l'effet d'une caresse... Matteo ferma à demi les yeux, les lèvres entrouvertes pour savourer ce moment de bien-être total. Il prit le carton par réflexe, toujours plongé dans sa rêverie. Il leva la tête vers l'homme et le suivit des yeux avec regret, admiration, et un sentiment autre qu'il n'arrivait pas encore à identifier, alors qu'il quittait le café.

Il fallut que le serveur attire son attention en lui tapotant l'épaule, avant que Matteo n'approuve la bouteille de vin qu'on lui montrait, trop perdu dans ce sourire ironique sur lequel l'inconnu l'avait quitté. Revenant à lui, il posa enfin les yeux sur la carte de visite.
Les yeux de Matteo s'exorbitèrent lorsqu'il lut le nom inscrit sur celle-ci. Puis, les fermant, il prit une grande inspiration, le temps que son coeur arrête de battre la chamaille. Ce ne pouvait pas être possible. Non, certainement pas. Cet homme. Ce n'était pas... ce n'était pas... Il entrouvit l'une de ses paupières.

ADORASTI

Le nom semblait écrit en lettres de feu, le marquant au fer rouge. Matteo se mordit la lèvre inférieure au sang. Alors, c'était donc lui, ce fameux Elio Lacryma Adorasti. Cet homme devait être le Diable! Un infâme suppôt de Satan! Un mage! Cela expliquait tout! Son charme, sa beauté, ses yeux, son sourire, son parler, tout! Et l'étrange attirance que Matteo ressentait pour lui, un sort, un vil maléfice... Pourtant, au fond de lui, le garçon savait que ce n'était rien de cela et que si les yeux comme le sourire d'Elio Lacryma Adorasti le hantaient, c'était pour une raison toute autre...

Son optimisme naturel finit par prendre le dessus, après qu'il ait avalé plusieurs verres d'alcool pour se remettre de l'émotion : au moins, il pourrait remplir sa mission pour le Prince. Car, où mieux que chez les Adorasti eux-mêmes, pourrait-il en apprendre sur les complots en train de se fomenter dans le dos de la Maison di'Grazziano?

Sans terminer son repas, Matteo se leva et prit son manteau. Il avait besoin d'air. Non, de repos. Il fallait qu'il ait la tête froide, une fois le soir venu. Qu'il ne laisse pas paraître son trouble. Qu'il cesse de trouver cet Elio Adorasti aussi séduisant... Il sentit le rouge lui monter aux joues. Quel puceau il faisait! Allons, une sieste et un peu d'air frais lui ferait du bien. Matteo sortit en coup de vent du Caffé Florian, comme il était entré, mais cette fois-ci, dans une humeur fort différente.


[Ca'Grazziano]
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleLun 23 Mai - 22:18

[Place Saint Marc - Nord]

Muzio poussa la porte du caffé. Une bouffée de chaleur l'envahit, qui, paradoxalement, le fit frissonner. Contre-coup sans doute. Un petit jeune homme se précipita vers lui pour le débarrasser de sa veste, puis repartit en sens inverse, sur ses petits jambes tressautantes. Drôle d'oiseau...
Le médecin ne reconnut personne ce qui, en soi, était normal étant donné qu'il n'était Vénitien que depuis une poignée de jours.

Il s'efforça de prendre un air aimable, décrispant ses lèvres gercées par le froid, tout en se dirigeant vers une table au fond de la salle. Assis ainsi, il pouvait observer avec recul les divers groupes qui s'animaient plus ou moins gaiement. Quel étrange contraste avec l'extérieur...

Un laquais lui apporta un verre, puis se retira sur un signe trahissant un léger agacement devant cet empressement. Le chirurgien huma le contenu du verre, scruta sa couleur, et finit par renoncer à identifier ce qu'on lui servait. La première gorgée faillit lui faire reposer le verre de surprise: la boisson chaude coulant dans son corps refroidi avait l'effet d'une brûlure... S'efforçant de n'en rien laisser paraître, Muzio reposa tranquillement le breuvage, et ses yeux errèrent sur les visages, avec une expression sereine, presque bienveillante malgré cette sempiternelle lueur grise de vague tristesse...
Revenir en haut Aller en bas
Basileo
Invité




Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMar 24 Mai - 19:50

[Ca'Adorasti]

Valcarenghi prit la peine de correctement refermer la porte aprés son passage, il semblait avoir sous-estimé la fraicheur vénitienne. Arrivé ce matin-même de Nantes où le climat était légérement plus clément, ses vétements étaient relativement légers.

Valcarenghi, qui n'avait donc pas remis les pieds au Caffé Florian depuis un petit moment, ne cacha nullement sa joie de voir que rien n'avait changé. Les mêmes habitués étaient là, dans leur coin, les voyageurs étaient toujours aussi nombreux, les discussions animées, les accents chantants et les senteurs de café ennivrantes.

Il s'avança lentement à travers la salle, slalomant entre les différentes table pour finalement rejoindre l'énorme bar derrière lequel plusieurs serveurs s'activaient. Basileo commanda un capuccino puis, appuyé au comptoir, fit face à la salle. Il promenait son regard sur les différents clients, s'attardant sur quelques demoiselles ou dames. Un petit sourire se dessina sur son visage... La Caffé Florian, toujours bien fréquenté est un plaisir pour les yeux de tout homme.

Basileo ne boudait pas son plaisir, une tasse fumante à ses côtés, le Gentilhomme au regard quelque peu inquisiteur repérait le terrain avant d'attaquer. Le gibier ne manquait pas. Mais la concurrence non plus.
Peu nombreuses étaient les femmes solitaires...
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMar 24 Mai - 20:14

Il y avait en effet plus d'hommes dans ce cas-là. Muzio en était, pas forcément pour lui déplaire. Il aimait observer les gens de loin; il arrivait mieux ainsi à se forger une opinion sur un climat, un groupe, un individu...

Lorsque la porte s'ouvrit, le regard du médecin s'y tourna spontanément. Le nouveau venu avait fière allure... Et une bonne dose de désir également, si Muzio interprétait bien la lueur qui s'était allumée dans l'oeil du gentilhomme. Vulgaire coureur de jupons ? Non, son charisme apparent laissait supposer autre chose... Décidément, le personnage avait réussi à capter l'attention du chirurgien. Celui-ci se leva et, son verre à la main dans un réflexe professionnel peut-être inutile, se dirigea vers l'inconnu.

Sourire poli, gestes naturels, ton cordial... étaient de rigueur.


"Pardonnez, monsieur, ma brutale irruption, et permettez-moi de vous inviter à ma table. La solitude, appropriée dans bien des situations, ne me semble pas reine dans un caffé... Voudriez-vous me faire le plaisir de vous joindre à moi ?" demanda-t-il en désignant d'un geste la table à laquelle il s'était installé.

La méthode de prise de contact ne lui allait pas. Clairement, il était homme à préférer une réflexion profonde et solitaire, et non à jouer des manches pour lancer des invitations... Tant pis, il avait un atout: sa sincérité.
Revenir en haut Aller en bas
Basileo
Invité




Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMar 24 Mai - 21:40

Basileo dont le regard s'attardait sur le généreux décolleté d'une donzelle ne vit pas approcher l'inconnu. Aussi, son intervention le fit quelque peu sursauter. Il fronça le regard en écoutant l'homme, qui semblait hautement respectable en tous points, s'exprimer.

Valcarenghi n'avait que trés peu l'habitude de se faire inviter à une table par un inconnu. Habituellement, c'est lui qui conviait. A la différence que les dit convives étaient quasi exclusivement des femmes.
Il posa les yeux sur la table puis revint sur son interlocuteur. Il ne l'avait encore jamais vu, mais sa prestance, sa façon de s'exprimer ou de se vêtir était révélateur d'un certain statut social. Un industriel de passage? Un haut fonctionnaire nouvellement débarqué? Il inspirait, en tous cas, confiance, aussi Basileo se saisit de sa boisson avec la main gauche, tout en adressant un sourire à l'inconnu.

"Et bien, Monsieur, refuser une invitation n'est guère dans mes habitudes, surtout si elle provient d'une personne qui semble être de qualité."

Il tendit la main droite afin de saluer l'homme.

"Basileo Orio Valcarenghi... Je ne crois pas vous avoir déjà vu en ces lieux, ou même tout simplement en cette cité... Vous êtes de passage?"

Le Gentilhomme fit un pas en direction de la table, aux côtés de son interlocuteur.
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMar 24 Mai - 22:07

Le charisme n'était donc pas qu'extérieur... Basileo Orio Valcarenghi paraissait tout à fait agréable, et de bonne compagnie.

Muzio rendit son salut au gentilhomme, et les deux hommes s'assirent face à face autour de la table du médecin. Celui-ci eut un sourire qui n'évoquait en rien la gaieté, mais renforçait l'aspect convivial de sa réponse.


"Vous possédez un excellent sens de l'observation, monsieur Valcarenghi; je ne suis en effet Vénitien que depuis quelques jours... mais non de passage, puisque je remplace le docteur Tréviano. Muzio Barrozi."

Le médecin avala une gorgée de sa boisson et retint de nouveau une grimace. Il inscrivit mentalement dans son esprit: 'la prochaine fois, commander quelque chose avant qu'on ne me le propose'. Son attention se reporta sur son interlocuteur, et il osa une question, bien que ce ne soit guère son genre d'aller au-devant des confidences. Mais la réponse ici ne risquait certainement pas d'heurter la pudeur de Basileo. Du moins s'il menait des activités normales...

"Je suppose donc que vous êtes depuis longtemps attaché à cette ville, pour en reconnaître le visage des habitants... ? Puis-je vous demander ce que vous y faites ?"

En effet, Basileo, malgré tout, ne devait pas être un aristocrate qui se faisait nourrir par sa seule présence. Mais, si Muzio s'était trompé et que son interlocuteur vivait de sa réputation, il l'aurait humilié. Alors... malheur au médecin.
Revenir en haut Aller en bas
Basileo
Invité




Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMer 25 Mai - 0:37

Valcarenghi s'assit de façon à ne pas tourner le dos à la salle. Il posa son café sur la table et offrit une oreille attentive à son interlocuteur. Désormais il connaissait ses activités, un médecin... Basileo n'avait jamais aimé cette profession, et encore moins ceux qui la pratiquaient. Des charlatans pour la plupart, prêt à tout pour vous tirez du sang ou de l'argent. Des esbroufeurs qui croient tout savoir, et qui, d'aprés les rumeurs, pratiqueraient des expériences bien peu catholiques.

Alors qu'il faisait face à un héritier d'Hyppocrate, il revenait à la mémoire de Valcarenghi plusieurs histoires morbides. Certains médecins ouvriraient des corps au couteau ou à la scie afin d'en explorer les moindres recoins. Ecoeurant...

C'était à cause de ce genre d'histoires, mais aussi parce qu'il était de constitution plutôt solide, que Valcarenghi ne fréquentait pas les cabinets de médecin. Bien sûr il préféra s'abstenir de révéler sa vision du monde médical à Barrozi.


"Tréviano... Je l'ai finalement trés peu connu... Nous nous sommes certainement croisés lors de soirées, mais pas plus..."

D'ailleurs, Valcarenghi, malgré ses efforts ne parvenait pas à remettre un visage sur le nom de Tréviano. Mais il n'eut guère le temps de réfléchir, les questions du médecin se faisait de plus en plus précises.


"En fait, je suis né à Venise... Mais j'ai grandit entre Florence, d'où est originaire ma mère, et ici. Et depuis que je dirige l'entreprise familiale je multiplie les voyages à l'étranger.
Nantes, l'Afrique Occidentale et même l'Amérique. Je suis armateur, vous comprenez... Bien belle activité..."

Basileo hocha plusieurs fois la tête, puis se tut. Les yeux dans le vide, il semblait plongé dans une profonde réflexion... Réflexion qui ne dura finalement pas longtemps. Valcarenghi posa un oeil sur la magnifique horloge qui ornait l'un des murs du caffé, puis vida précipitamment sa tasse de café.

"Je suis vraiment confus, mais je dois vous laisser Monsieur. J'espère que nous nous reverrons. Il est vrai que nous n'avons guère eu le temps de palabrer, et j'en suis désolé. Alors, au revoir Monsieur Barrozi."

Valcarenghi se leva, inclina légérement la tête en direction du médecin, puis prit congé. Il devait se préparer pour la fête organisée ce soir par le Prince. Aussi il s'en retournait au palais.

[Ca'Adorasti]
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMer 25 Mai - 22:00

Muzio n'eut même pas le temps de se lever pour accompagner Basileo. Bouche bée, il bafouilla une vague formule d'adieu, avant de se rasseoir. La conduite du gentilhomme était tout simplement incompréhensible; avait-il réellement un évènement prévu, ou mentait-il ? Peut-être regrettait-il déjà d'avoir dit son activité ?

Le médecin chassa ces pensées de son esprit. D'ailleurs, peut-être reverrait-il Basileo Orio Valcarenghi le soir-même, par un étrange concours de circonstances ? La boisson ne franchissait plus le seuil de ses lèvres. Irrité, Muzio se leva, déposa quelques pièces sur sa table puis marcha à grands pas vers la sortie. Il n'était là que depuis quelques minutes, mais le passage en coup de vent de l'armateur l'empêchait de rester tranquillement à sa place.

Il décida qu'il en avait assez vu de Venise pour le moment, puisqu'il devait de surcroît supporter ce soir une réception. Le chirurgien resserra les pans de son manteau et affronta de nouveau le froid de la rue. Direction, son chez lui. Là il serait tranquille au moins...


[La maison du médecin]
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleDim 29 Mai - 16:32

[Quartier de la Bouche d'Ombre - ruelle de l'Ours]

La main de Muzio poussa, pour la deuxième fois en peu de temps, la porte du caffé Florian. Le médecin s'engouffra dans la chaleur et se dirigea immédiatement vers le comptoir, bien décidé à choisir sa boisson. La leçon avait porté ses fruits... Il commanda un capuccino bien serré et se laissa choir sur une chaise au milieu de la salle. Les yeux fermés, il respirait lentement et profondément l'odeur sucrée résultant du mélange des parfums aristocratiques...

L'atmosphère empruntée du lieu ne lui plaisait que très moyennement en temps normal, sans compter la foule de visages qui l'entourait. Mais à ce moment-là, aucun endroit de la ville n'aurait pu avoir le même effet réconfortant... Les images du quartier de la Bouche d'Ombre repassèrent inexorablement dans sa tête. Un tel état de misère lui donnait envie de hurler; de la bile remonta jusque dans sa gorge. Que la pauvreté existe, Muzio le savait, bien évidemment. Il l'avait même appréhendée assez souvent. Mais que Venise, Venise refoule dans un coin tout ce dénuement...

Non !, il ne pouvait rester inactif. Il agirait dès le lendemain; il ne savait pas comment encore, mais il agirait. Il était au courant, maintenant...

Muzio ouvrit les yeux et, sourcils froncés, vida d'un trait la tasse qui venait de lui être apportée. Son front était encore poisseux de sa sueur, et sa poche de justaucorps déplorait la perte de son habitant quotidien, le fidèle mouchoir blanc. Ah oui, il serait beau pour la réception, le remplaçant de Tréviano...
Revenir en haut Aller en bas
Tannucci
Invité




Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMar 21 Juin - 20:07

[Eglise San Siriano - Parvis]

Tanuccia avait trouvé le trajet très plaisant.Matteo s'était montré des plus distrayants et elle-même avait tenté quelques touches de son humour si particulier.Elle avait écouté l'homme de main fanfaronner durant tout le long, il était vraiment incroyable et Tannuccia avait quelque peu douté de n'être finalement pas plus âgée que lui tant la présence de son innocence et de sa fraîcheur d'enfant était omniprésente.Elles semblaient marquer la mesure après chacune de ses phrases, suivant avidemment ses gestes extravagants qui forçaient les passants à s'écarter sur leur passage. La Princesse n'avait pas beaucoup parlé, mais ses oreilles n'en étaient que plus attentives aux commentaires acerbes de Matteo sur les vénitiens. Elle lui souriait avec indulgence, fronçait les sourcils lorsque quelque chose lui réclamait plus d'attention, voire plissait les yeux ou bien hochait la tête en signe d'approbation. Mais les mots avaient eu quelque peu de mal à trouver la sortie, et le chanté de sa voix rauque n'avait tourbillonné dans l'air avant de se perdre dans les nues, il s'était lamentablement affalé sur le sol.

Elle était troublée, les dernières paroles de matteo l'avait bousculée et avaient failli détruire le fragile édifice qu'elle avait dû reconstruire depuis les fondations.Comme Venise, elles se trouvaient à présent submergées d'eau.Cette eau qu'elle n'avait presque jamais versé.Si seulement il avait pu avoir raison, si seulement ses lèvres avaient eu ce pouvoir mystérieux.Elle l'avait essayé.
Aussi aux paroles de Matteo, la jeune femme avait sourit mimant avoir été flattée par ses propos.Mais elle n'avait rien ajouté et avait embrayé sur un autre sujet, usant de pirouettes habiles.Matteo était aussi volubile que l'air et son attention s'en trouvant aussi facilement déroutée.De plus Tannuccia savait sur quels sujets se lancer pour que la conversation soit animée sans en devenir décadente ou lourde.

La Princesse avait aussi eu le temps de méditer sur la journée qui s'était écoulée et en avait déduit qu'il avait été positif.Quelques petites contrariétés sans importance étaient venues la troubler dans sa quiétude mais elle les avait rapidement chassées d'un revers de main dans l'air, comme si elle chassait un nuisible invisible.
Tannuccia poussa doucement la porte de Caffé Florian, lachant un instant sa robe dont les vagues allèrent choir sur le sol avec grâce dans un adorable bruit de frou-frou.Puis elle entraîna matteo dans un coin de Caffé à sa table favorite.Oh, cela ne faisait guère longtemps qu'elle le fréquentait et pourtant, comme ces vieilles dames acariâtres et casanières elle préférait garder ses habitudes.Aussi avait-elle choisi cette table et non une autre et n'en changeait pas.Ce n'était pas la plus isolée, ce n'était pas celle vers laquelle on se dirigerait en premier, c'était juste une table, une table parfaite.

Tannuccia n'avait aucunement besoin d'aide pour s'asseoir, ni pour que l'on lui tire la chaise en arrière pour qu'elle puisse s'y déposer.Elle tira la chaise vers elle et la balaya comme elle eut craint qu'il n'y eu quoi que ce soit qui eut pu entâcher sa robe, puis s'y assit avec calmement en soupirant d'aide.La marche l'avait usée.Elle plaça ses coudes sur la table, joignit ses deux mains et y aposa son menton tout en scrutant Matteo avec attention, un l"ger sourire affiché sur son visage coquin.


-"Alors Matteo, votre journée a-t-elle été plaisante ? Avez-vous beaucoup eu l'occasion de vous ravir devant la contemplation de Venise ? Cette ville vous a-t-elle séduite ?"

Tannuccia appuya sur le dernier mot en plongeant son regard dans celui de Matteo avant de relever le menton fièrement, sa main gauche déposée sur sa gorge nue.De sa main droite elle faisait claquer ses ongles sur la table comme si elle voulait marquer par ce son, un signe quelconque d'impatience alors qu'elle savait qu'elle avait tout son temps.Elle balaya la salle du regard à la recherche de quelqu'un digne de venir les servir, Matteo et elle, mais elle tomba sur un homme qu'elle ne connaissait que de vue.Il lui avait semblé avoir entendu dire que le brave homme était médecin mais ceci était beaucoup moins sûr, ce dont elle était cependant certaine était que son nom était Muzio Barrozi.Elle regarda Matteo, sourit avant de reposer son regard sur l'homme et lui lança :

-"Monsieur Barrozi vous me semblez bien seul à cette table isolée.Nous feriez-vous l'honneur de vous joindre à nous ?"
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleMar 21 Juin - 22:37

Révolté, le médecin remuait toujours ses idées noires. Le petit minois sale de l'enfant qui était venu le supplier le hantait. En tant que médecin, en tant qu'être humain, Muzio ne pouvait rester spectateur de cette pièce. Et pourtant que pourrait-il faire ? Il avait dépassé le stade des illusions depuis longtemps... Depuis six ans surtout... Pas d'utopie donc, pas de fol espoir de faire changer la société vénitienne d'un sourire béat ou d'un froncement de sourcils. Non, la bataille serait rude, peut-être perdue d'avance, mais il fallait l'entamer.

Le chirurgien sursauta lorsqu'une jeune voix l'interpella. Heureusement que sa tasse était vidée, sinon le costume aurait été taché, et Dieu savait qu'il n'avait pas besoin de cela en plus avant la réception... Muzio se secoua mentalement, écarquilla les yeux, et repéra enfin qui l'avait appelé. Une jeune femme. Une belle jeune femme. Une princesse évidemment. Qui connaissait son nom. 'On se croirait en plein conte de fées', songea-t-il avant de retomber dans la réalité. En tout cas pour le moment, il lui fallait réagir. Muzio fit le ménage dans son cerveau en deux temps trois mouvements, afin de laisser la place aux évènements actuels de s'y dérouler.

Il se leva, laissant sa tasse vide sur sa table, et s'approcha de celle des deux jeunes gens. Parce qu'elle était accompagnée en plus. Le médecin s'inclina légèrement et esquissa un sourire à peine forcé.


"Mademoiselle, c'est avec un grand plaisir que j'accepte votre gracieuse invitation..."

Le médecin prit place. Son corps composait parfaitement la décontraction; seule une lueur noire agitait encore l'abîme de ses yeux. Muzio posa ce regard successivement sur Tannuccia, puis sur Matteo. La légèreté qui semblait les habiter frisait la frivolité; elle provoqua une vague mi-soulagée, mi-révoltée chez le chirurgien qui ne put s'empêcher de faire le rapprochement avec les jeunes du quartier de la Bouche d'Ombre. Cette pensée l'obsédait, il fallait absolument qu'il arrive à s'en défaire le temps de la soirée. Il reporta son attention sur le couple. Amis ? Amants ?

"Mais je ne crois pas avoir eu le plaisir de connaître votre nom, bien que vous sachiez le mien..." commença Muzio en esquissant un sourire poli, mais beaucoup plus franc cette fois-ci.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 23 Juin - 17:39

Bien décidé à effacer de sa mémoire les évènements de la journée, Matteo avait repris son entrain habituel. Se glisser dans la peau du charmant personnage qu’il jouait avec adresse était pour lui un véritable bonheur, après les troublantes rencontres de la journée. Ainsi, c’est la Princesse autant que lui-même qu’il divertit de ses anecdotes ou de ses potins. Lorsqu’ils croisaient un noble ou une courtisane de sa connaissance, le jeune homme s’empressait de raconter à Tannuccia des détails croustillants à leur propos, que ce soit de leurs liaisons, leurs dernières acquisitions d’un luxe scandaleux ou du dernier bal – « un fiasco! » – qu’ils aient organisé. La jeune femme était une interlocutrice attentive, qui savait l’aiguillonner sur des points particuliers ou lui poser des questions qui relançait la conversation vers des horizons nouveaux.

L’étoffe cramoisie d’un pourpoint lui rappela une très bonne histoire à propos d’un duc napolitain – « qui avait engendré au moins une bonne douzaine de bâtards » - qu’il ne manqua pas de narrer à son interlocutrice, le sourire d’une dame évoqua chez lui le souvenir d’une soubrette – « la plus belle créature que Dieu eut mis sur Terre, à l’exception de vous-même, bien sûr, Princesse » - à qui était arrivée la plus folle des entreprises! Chacun de ses bons mots était illustré par un éclat de rire ou par des gestes grandiloquents pour mettre l’emphase sur tel ou tel passage de ses récits. Il se détachait de la foule autour de lui, emporté dans les salons de Pise ou de la lointaine Lombardie. Devant ses yeux dansaient jupons et justaucorps, s’emmêlant dans un tourbillon effréné, qu’il arrivait à décrire avec force d’images et d’enjolivements.

Sans lui laisser le temps de lui ouvrir la porte, Tannuccia était entrée dans le Caffé Florian, laissant la galanterie de Matteo en plan. Il laissa son manteau à un valet et se laissa guider par la jeune femme jusqu’à une table. S’il avait voulu se racheter en lui tirant sa chaise, la Princesse alla de nouveau à l’encontre des convenances en s’asseyant par elle-même. Son indépendance l’impressionnait. La gent féminine se soumettait normalement de bon cœur aux civilités que leur devait le sexe fort, certaines exploitaient même ces démonstrations des bonnes manières à leur avantage. La Princesse Tannuccia n’était n’appartenait à aucune de ces catégories. C’était peut-être ce qui la rendait si désirable : cette farouche fierté à ne pas être comme le commun mortel. Non pas seulement grâce à sa beauté, mais aussi son esprit émancipé.

Une fois que sa compagne se fut assise, Matteo prit siège à son tour. Comme à son habitude, il s’assit sur le bord de sa chaise, prêt à se lever à tout moment pour accueillir un invité ou serrer une main. Cette position convenait parfaitement à l’énergie qui l’habitait. Il aurait été incapable de se caler confortablement contre son dossier, il devait absolument être paré à n’importe quelle éventualité.

Avant qu’il n’ait eu le temps de répondre à sa question, Tannuccia interpella un homme assis seul à sa table. Le regard de Matteo convergea immédiatement dans sa direction, curieux de connaître la personne à qui la Princesse avait condescendu de s’adresser. C’était un homme, dont l’âge était difficile à définir. Il dégageait une grande égalité d'âme, une sérénité qui apaiserait le démon le plus turbulent. Apparemment, il était surpris par l'invitation de Tannuccia. C'était donc que leur connaissance n'allait que dans un sens... Le garçon lui accorda un sourire amène. Il n'était visiblement pas homme à fréquenter assidument les salons. Un homme de sciences, peut-être?

Matteo se leva et lui fit un bref salut. Il se doutait que ce Monsieur Barrozi ne serait pas à l'aise avec une courbette plus élaborée. Valait mieux le mettre en confiance, pour mieux évaluer sa valeur. Il n'en ferait pas un amant, mais d'autres ressources s'offraient sans doute à lui. Ses yeux bleus se plongèrent dans ceux de l'homme en face de lui.


« Monsieur, vous me voyez enchanté de faire votre connaissance. »
Revenir en haut Aller en bas
Tannucci
Invité




Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleSam 25 Juin - 16:41

Tannuccia vit avec amusement la surprise du médecin lorsque sa voix l'interpella.Il avait sursauté si fort que la Princesse eut presque cru un instant qu'il n'ait une attaque.Quelle ironie pour un médecin.Enfin, elle éxagérait, elle aimait bien créer toutes sortes de scénarios loufoques remplis d'hyperboles.Aujourd'hui elle orchestrait l'attaque subite d'un médecin, hier la noyade d'un pauvre gondolier dont le chapeau - le traître - s'était lâchement enfui vers d'autres horizons et que, ce même gondolier, désespéré par le départ soudain de son couvre-chef, avait décidé de mettre fin à ses jours.La vérité était que le gondolier avait tenté de récupérer son stupide bonnet et qu'il avait basculé dans les eaux ténébreuses et glaciales du Canal.Tannuccia n'avait pas pu assister à la suite, quelle tragédie... Mais elle ne doutait point de la qualité de la fin pour une chute exceptionnelle et bouleversante.Malheureusement, elle n'avait pas trouvé son titre parmi les morts d'hier.Ils étaient peu, et pour preuve, il n'y en avait aucun.

La Princesse regarda l'homme s'avancer avec un intérêt grandissant.Elle se délecta de l'odeur de plantes et de sûreté qui se dégageait de lui.Il semblait légèrement préoccupé ou bien n'était-ce qu'une simple impression dû à l'esprit torturé de Tannuccia.Cette dernière se demandait si elle était si effrayante que cela pour l'avoir surpris, lui, un homme d'âge mûr et de calme apparent.Elle se mira un instant dans les yeux de Matteo en lui souriant presque tendrement et en déduit que non, elle était loin de l'être.L'homme s'inclina et s'assit.Tannuccia se leva afin de faire une révérence courtoise en souriant avec légereté.


-"Et que voilà un grand honneur que de vous accueillir à notre table Monsieur."

Matteo déclara aussi quelques civilités polies.Comme quoi aujourd'hui tous semblaient ravis de se rencontrer, c'était fort cocasse.Hypocrisie ou pas, tous semblaient se vouer un respect partagé, et malgré les petites tensions qui pouvaient régner, voires les désaccord et les haines, chacun savait trouver en l'autre un allié ou adversaire digne ainsi qu'à la hauteur.Tannuccia ne connaissait pas encore Muzio, mais ne doutait pas de déceler chez lui quelques trésors et elle s'evertuerait de toute façon pour en tirer le maximum.

Tannuccia sourit à nouveau en le voyant les réluquer du regard.Elle tourna son regard vers Matteo en replaçant une mèche de ses cheveux derrière son oreille ainsi qu'en lui adressant un sourire complice.Elle savait ce qu'il pensait, ce n'était pas dur de deviner.La même chose que les clients, la même chose que els passants.Qui étaient-ils l'un pour l'autre ?

Elle écouta patiemment la question du médecin, reprenant sa position initiale, adoptée lors de son arrivée au Caffé, les coudes sur la table, les mains jointes et le menton posé sur ses mains entremêlées.


-"Oh ! Pardonnez mon étourderie. Je me permets de vous présenter aussi mon Cher, dit-elle en s'adressant à Matteo.Elle tendit sa main vers l'homme de main, voici Matteo Salvanti, et moi-même, Princesse Tannuccia Di Alessandro."

Elle avait tenu à n'en dire que le strict minimum et à ne pas s'étendre trop.Matteo rajouterait ce qu'il désirait à la présentation faite par la Princesse mais elle ne tenait pas à l'embarrasser aussi étrange que cela paraisse.
Tannuccia interpella un serveur alors qu'il passait à proximité de leur table.Celui-ci s'approcha et, à chacun de ses pas, il paraissait se redresser et prendre des allures faussement aristocratiques.Sans doute pensait-il avoir affaire à de riches personnages qui lui donneraient un excellent pourboir.Les gens étaient si prévisibles.Et lui, si....mauvais comédien.Enfin cela n'avait guère d'importance, ce n'était qu'un masque de plus.


-"Un thé Tilleul-Menthe je vous prie.Que prendez-vous quant à vous ?"

Tannuccia aurait pu etoffer sa phrase, rajouter un "comme d'habitude" après sa commanda, un "mes amis", après sa demande mais non, elle faisait bref et succint.cela ne lui ressemblait guère.Elle était torublée voilà.Mais elle se doutait fort bien qu'un thé ne serait pas le remède miracle qui panserait ses plaies béantes.Cependant il lui apporterait un peu de réconfort, de quoi la faire se concentrer sur sa langue brûlée par la chaleur de la boisson.Surtout, pas sur lui.C'était un procédé utilisé en médecine, détourner l'attention du patient sur un autre point douloureux afin de le soigner à la vraie source de son mal.Elle regarda les deux hommes en souriant, ils pouvaient prendre ce qu'ils désiraient, ce serait elle qui paierait.Encore un pied de nez aux conventions de l'époque.Marre, véritablement marre.Tant de lassitude.Cependant elle leur sourit aimablement, comme toujours.
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleLun 27 Juin - 19:25

Il n'avait fallu que quelques secondes à Muzio pour se détendre totalement. La sérénité qui le caractérisait ne l'abandonnait que rarement, et ne lui faussait jamais compagnie bien longtemps. Un avantage dans son métier ou la conséquence de son métier ? Il ne savait plus... Toujours est-il que ce calme apparent, utile à la campagne, devenait un atout majeur à la ville, parmi les tensions régnantes. Le médecin ne s'étonna donc pas outre mesure lorsque la Princesse Di Alessandro prit l'initiative -typiquement masculine- de commander les boissons. Le café serré qu'il venait d'avaler lui avait suffi. Néanmoins, il était hors de question de répondre par la négative à la demande d'une demoiselle. Tant pis, un deuxième elixir lui permettrait de passer la soirée un maximum lucide.

"Un café pour moi, je vous prie. Sans sucre." ajouta-t-il, les méfaits d'un trop-plein de glucose lui étant connus.

En face de lui, le regard tourmenté de Tannuccia ne collait pas avec son sourire éternellement aimable. Quelle plaie que la société, où il faut feindre sans cesse ! Muzio rapprocha sa chaise de la table à laquelle il s'accouda dans un geste naturel. Il s'était de nouveau coulé dans son égalité de caractère. Seul son front légèrement luisant témoignait encore de son excursion précédente; il avait fait taire la lueur agitée de ses prunelles pour laisser place à un brin de curiosité. Tant qu'à être à la même table, autant se connaître un minimum. Les noms confiés par la Princesse n'évoquaient rien pour lui. En revanche, son expérience croyait reconnaître le malaise décelé tout au fond de la jeune femme. Mais bien entendu, il ne pouvait aborder ainsi la discussion...

"Permettez-moi de me présenter un peu mieux. Je suis médecin, le remplaçant de maître Tréviano. Peut-être le connaissiez-vous... ?"

Tréviano. Première piste trouvée pour entamer la conversation. Ce serait parfait... tant que sa mort ne reviendrait pas sur le tapis, évidemment. La plupart des gens faisait preuve d'une curiosité malsaine à ce sujet; Muzio commençait à savoir éluder la question...
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian PerleJeu 30 Juin - 23:16

Matteo sentit un léger changement dans l’attitude de Tannuccia. La manière dont elle s’exprima, d’abord, sans l’ostentation dont elle faisait d’habitude preuve. Et puis, cette lueur dans ses yeux démentait son sourire amène. Le garçon s’en inquiéta. Instinctivement, il chercha à croiser son regard, afin de voir ce qui lui causait tourment. La Princesse était trop belle pour avoir des soucis. Il n’aurait pu supporter de voir son front se plisser sous l’effet des tracas.

Levant les yeux vers le garçon, Matteo battit des paupières un instant, le reconnaissant comme celui qui l’avait servi plus tôt dans l’après-midi. Résistant à l’envie de baisser la tête en pensant à sa rencontre précédente au Caffé Florian, il commanda de sa voix chantante:


« Un vin de Chypre, s’il vous plaît. Ce que vous avez de mieux. »

Ceci fait, il revint à ses hôtes avec un sourire rayonnant. Secrètement, Matteo espérait que le serveur lui revienne avec le même vin que le Prince Elio Lacryma Adorasti.

* Ainsi, pensa-t-il encore plus secrètement, peut-être pourrais-je me rapprocher ne serait-ce qu'un infime moment de sa personne *


« Matteo Salvanti, votre humble serviteur, fraîchement arrivé à Venise, tout comme vous semblerait-il, Maître Barrozi, » fit Matteo, pour complémenter la présentation sommaire de Tannuccia et poursuivre sur le sujet de l’ancien médecin.

Matteo avait délibérément omis de parler de son appartenance à la Ca’Grazziano. On n’était jamais trop prudent. Avec ce qui allait se dérouler le soir même, il valait mieux qu’on en sache le moins possible sur sa personne. Il n’accusait pas encore ce Barrozi d’être à la solde des Adorasti, mais savait-on jamais? Sa position lui permettait d’en savoir beaucoup et sa neutralité n’était peut-être qu’apparente.

Comme il n’était à Venise que depuis peu, Matteo n’avait pu faire la connaissance de Maître Tréviano, mais la raison de son départ l’intrigua. Venise avait-elle représenté un trop grand défi pour l’homme de sciences? Les cruautés qu’il y avait rencontrées avaient-elles eu tôt fait de ses nerfs? Lui avait-on demandé de prendre parti pour une Maison ou une autre? Le jeune homme jaugea Barrozi d’un regard pensif. De quel côté pencherait-il, si on devait le convertir? Le médecin pourrait être d’une grande utilité. On ne peut jamais rien cacher à son docteur. Des marques sur un corps pouvaient en révéler long sur l’existence d’un individu. Matteo se promit d’être d’une exquise gentillesse avec Maître Barrozi afin que plus tard, il ne puisse rien lui refuser. Ses yeux se promenèrent sur le pourpoint de son interlocuteur, puis sa culotte. Il lui faudrait savoir sous peu si le docteur avait un faible pour les blonds…
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Le Caffé Florian Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian Perle

Revenir en haut Aller en bas
 
Le Caffé Florian
Revenir en haut 
Page 1 sur 6Aller à la page : 1, 2, 3, 4, 5, 6  Suivant
 Sujets similaires
-

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
VENISE :: ENTRE NOUS :: LA CITE :: Place Saint Marc-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser