Le Prince resta un moment silencieux, il n'était pas dans sa nature de faire étalage de ses sentiments.
Cependant ses doigts se crispèrent un instant sur le sous-main de son bureau à l'évocation du nom de l'homme de confiance de son père.
Avoir été dans l'obligation de l'accueillir à Venise au palais Adorasti avait été une torture dont il ne se remettait toujours pas.
L'homme avait des yeux partout, semblait épier chaque mouvement de la maisonnée et affichait en toutes circonstances cet air sûr de lui qui insupportait Elio.
De le savoir entre ses murs, le Prince ne se sentait plus chez lui.
Il ne doutait pas que di Lorio devait payer grassement les informations que ne manquaient pas de lui fournir les serviteurs de la maison.
Aussi, lorsque Gabriella lui rapporta leur conversation, il en fut troublé.
Malgré les réprimandes et les rebuffades que la jeune servante subissait de sa part, elle lui était fidéle ? Peut-être jouait-elle simplement un double jeu, s'attirant ainsi les bonnes grâce de l'un comme de l'autre. C'était plausible.
Cependant, la lueur qu'il voyait dans les yeux verts de la jeune fille chaque fois qu'elle s'adressait à lui, lui laissait à penser tout autre chose.
Il lui sourit et sa voix était douce quand il parla.
"Je vous remercie de me rapporter cela, Gabriella. Je sais qu'il ne doit pas être facile pour vous d'être ainsi mise au milieu de ces querelles d'intérêt qui ne vous concernent pas. J'apprecie que vous vous sentiez appartenir à cette Maison au point de vous ranger de mon côté face à Monsieur di Lorio. Cependant, et ne voyez pas de reproche à ceci, je préférerais que vous ne vous exposiez pas. Cet homme.."
Il eut une hésitation, Gabriella paraissait trés jeune et inexpérimentée des choses de la vie malgré ce qu'elle avait dû trés certainement endurer. Il ne voulait pas que son intégrité lui attire quelque ennui que ce soit.
Aussi, son regard se fit insistant quand il reprit la parole.
"Cet homme est dangereux, jeune fille. Je sais que vous pensez être de taille à vous défendre. Mais, ne vous attirez pas ses foudres. Il est sans nul doute, réellement dangereux et si vous vous mettez en travers de son chemin, il se moquera bien de votre jeunesse et de votre joli minois. Soyez courtoise et faites votre service ainsi que vous en avez l'habitude mais ne vous exposez pas.
Je voudrais vous entretenir d'une chose. Discrètement, je vous prie"
[Affaires discrètes]