VENISE
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 Le Petit Salon

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Ivano Polacco
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Annavera de Luca
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Iago degli Albizzi
Pourpre
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Coriolan
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleDim 22 Jan - 11:56

[La Bibliothèque]

Coriolano pénétra dans le salon avec un peu moins de discrétion qu'à l'accoutumée. Son corps semblait s'être fait le miroir de ses réflexions qui, telles des soldats disciplinés, s'élançaient à la charge d'une idée ennemie. Aussi ne prit-il pas le soin de retenir la porte de la pièce qui alla claquer contre le mur.
Le bruit sec le rappela à la réalité et il leva les yeux sur le tableau pour le moins surprenant qui se jouait devant ses yeux. Son jeune et innocent poète face à celle dont il avait, pour un temps, totalement oublié l'existence. Ainsi, elle était là également. Elle était revenue. Comme à son habitude, sa seule présence bousculait les plans délicats que Coriolano avait jusque là forgés. Et le hasard - le hasard ? - l'avait mis en présence de la personne la moins appropriée à la recevoir. Cilio.


*N'oublie pas. Ne le sous-estime pas. C'est pour son potentiel que tu l'as amené jusqu'à toi.*

Coriolano sourit à ce contradicteur intérieur et, pour marquer un peu plus sa présence, toussota avant de saluer les deux interlocuteurs.

"Cilio ! Tu vas me rendre jaloux. Voilà que j'ai entre mes murs l'une des plus belles femmes que je connaisse et c'est vers toi qu'elle vient. Chère Angelica... Avez-vous déjà juré d'égratiner mon coeur, dans cette ville ? Quoiqu'il en soit, soyez la bienvenue."


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Angelica
Invité




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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleDim 22 Jan - 20:20

Angelica sentait toute la fragilité qui se dégageait de Cilio. Et c’était justement ça qui l’inquiétait. Quelle arme redoutable cachait-il derrière cette douceur envahissante ? Quoi que.. il semblait si troublé… que cela ne pouvait être feint. Dieu ! Ce qu’elle pouvait être sur la défensive. Pourquoi voir des ennemis partout ?

Elle avait tendance à tester tous ceux qu’elle rencontrait. Elle pouvait alors se montrer d’une dureté très déstabilisante. Mais cette forme poétique touchait la jeune femme. Sur d’autres, elle aurait méprisé ce qui s’apparentait pour elle à une forme de niaiserie, ou de faiblesse. Mais sur lui, cet aspect était limpide, pur, et sonnait juste.

Son regard croisa alors celui du jeune poète. Elle y lut un mélange d’étonnement, et de gratitude… Elle ne pouvait décidément se résoudre à l’effrayer.


« Il aurait été étonnant que vous m’ayez v plus tôt. Je suis arrivée, en effet, il y a peu. » Répondit-elle d’une voix à l’opposé de celle, timide, du poète.

Sur ce, Ugo entra. Elle ne pensait pas le revoir si vite. Voyons… Il avait le même regard, ce même charisme… Angelica masqua un discret sourire en lisant l’étonnement contenu du jeune prince. Elle se remémora les circonstances par lesquelles elle l’avait rencontré. Elle se douta, qu’une fois encore, elle n’était pas arrivée au moment le plus approprié. ce qui ne la gênait pas outre mesure: elle avait l'habitude de bousculer les personnes qu'elle cotoyait.

« Je vous remercie de m’accueillir.» Elle s’inclina légèrement, d’un geste souple, qui avait quelque chose de félin. Ses cheveux ondulés, aux reflets si particuliers se balançant sur son épaule.

Elle sourit soudain. Ses yeux eurent comme un éclat, et elle ajouta, d'une voix indéfinissable, mais dénuée d'agressivité.
« Cependant, vous savez bien que les compliments sont vains avec moi. Voyons, j'espère que vous ne pensez pas que cette ville puisse me transformer?»


Dernière édition par le Mer 25 Jan - 14:53, édité 1 fois
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Cilio de
Invité




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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleMar 24 Jan - 20:15

Alors qu'il s'apprêtait à répondre une mondanité à Angelica, Cilio entendit la porte claquer brusquement contre le mur. Dans l'embrasure se trouvait son Prince, dont l'aura, comme d'habitude, envahit instantanément la pièce. Tout comme Cilio quelques instants auparavant, il fut tiré de ses pensées - certainement, pensa le jeune poète, de la plus haute importance - par la présence non moins charismatique de la Signora Visconti.

La Prince s'adressa à Cilio, mais ce dernier sentit clairement le peu d'importance qu'il lui accordait face à la jeune femme. Ce qui lui sembla parfaitement normal étant donné la noblesse apparente de celle-ci. Le regard qu'échangèrent les deux jeunes gens n'avait pas matière à doute: ils se connaissaient déjà sinon bien, au moins assez bien pour apprécier ces retrouvailles. Apprécier... Au sens large.

Cilio sentit la chaleur lui monter aux joues aux paroles du Prince. Un reproche sous-entendu de sa présence? Mais quoi de plus logique, après tout? Sa condition de poète ne lui permettait pas d'accueillir des personnes de haut rang dans la Maison Grazziano... S'il l'avait su ! Aurait-il, une fois de plus, agi de manière dégradante pour la Maison Grazziano? Il ne faisait décidément rien comme il fallait.

Comme pour se faire pardonner de son impudence involontaire, Cilio s'inclina un peu plus profondément que d'habitude. La pique lancée par Angelica, loin d'étonner Cilio qui avait perçu le tempérament enflammé de la jeune femme, ne fit que confirmer l'impression qu'il avait eue : ces deux-là avaient vécu ensemble des choses, des choses dont il n'aurait pu définir, ni même tenter de définir la nature, ne serait-ce que par profond respect pour le Prince. Il se contenta de garder en lui l'émotion perçue, pour peut-être plus tard, y puiser l'inspiration d'un prochain poème...

Il releva légèrement la tête afin de pouvoir regarder son Prince dans les yeux lorsqu'il proposa, presque à contre-coeur :


"Je peux me retirer, si vous souhaitez vous entretenir quelques instants avec la Signora Visconti..."
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Coriolan
Invité




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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleMar 24 Jan - 21:43

Etait-ce l'exiguité de la pièce ? Ou peut-être l'état de nervosité rentrée dans lequel il se trouvait ? Toujours est-il qu'en cet instant, Coriolano sentit se nouer quelque chose entre les deux personnes qui se trouvaient devant lui. Cilio et Angelica. Le diamant brut et la lame. Oui. Un geste maladroit de la part de la main qui la manipulait, et cette lame pouvait définitivement détruire le diamant qu'elle sculptait. Mais pour peu que le joaillier soit habile, et l'on s'arracherait bientôt le bijou qu'il produirait. Il allait falloir être très prudent.

"Je t'en prie Cilio, reste. A vrai dire, je te cherchais, pour t'entretenir d'une affaire d'importance."

Coriolano eut un large sourire. D'un pas dansant, il tira les rideaux, découvrant une cour intérieure fleurie, et laissant une lumière froide pénétrer dans la pièce. L'endroit avait été tenu dans l'obscurité pendant bien longtemps et laissait entrer la lumière avec réticence. Malgré la magnificence de la demeure, Coriolano devinait, sous les riches tentures, les traces d'humidité... qui, si on n'y prêtait pas attention, risquait de se muer en moisissure. Il n'y avait rien à y faire. Tout ce que l'on pouvait, c'était faire oublier cette corruption en détournant l'attention des visiteurs sur autre chose. La table basse en bois. Les petits fauteuils bleus, le bouquet de rose... Un visage charmant.

"Ceci dit, Cilio" poursuivit le prince, "j'ai eu mon compte de discussions sérieuses pour la journée, aussi, je ne doute pas que la présence de la Signora Visconti nous aidera à mieux supporter les multiples sujets que nous devons aborder. A moins que vous n'ayez à faire ailleurs, douce Angelica", ajouta-t-il avec un geste galant à l'égard de la jeune femme. "Cependant croyez-moi, je pense que l'affaire qui nous occupe pourrait vous distraire au plus haut point."

Sur ces mots, Coriolano prit place dans l'un des sièges et, d'un signe de la main, invita ses deux interlocuteurs à s'asseoir. Le silence retomba un instant. Au loin, on entendait le cri d'un gondolier.


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Angelica
Invité




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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleMer 25 Jan - 15:18

Une sensation étrange… La fragilité de Cilio, le charisme impérieux d’Ugo. Tous deux avaient leur particularité. Aucun ne pouvait passer inaperçu dans Venise. Elle se sentait bien mieux en leur compagnie qu’avec des courtisanes ou des gentilshommes : elle oubliait un instant Venise et ses habitants.
Elle ne s’aperçut donc même pas qu’elle étouffait dans cette trop petite pièce, entourée de deux hommes dont elle ne savait pas ou plus grand chose. Elle avait appris à faire taire ces sentiments, à les ignorer et à ne plus les remarquer. Son regard conservait ainsi cet éclat de force et ses gestes étaient vifs et sûrs.
Sans attendre, elle s’assit, sans brusquerie ; avec une certaine élégance, toutefois particulière. Dans son attitude rien n’était séduction. Tout en elle semblait découler d’une logique sûre et implacable, qui la mènerait vers un but mystérieux.


«Je ne saurai songer à partir, tant que ma présence ne vous importune pas, bien sûr.» Toujours cette voix étrange.

Elle se tourna vers Cilio. Ses yeux rencontrèrent ceux du poète. Elle l’observa un instant. Essayant de deviner ce qui se cachait derrière ce regard d’artiste. Il avait quelque chose d’indéfinissablement supérieur. Comme-ci, au fond, son art l’élevait de la bassesse humaine dans laquelle chaque Homme était plongé au cours de sa vie. Elle tourna la tête, soudainement consciente du regard mortifiant qu’elle lui jetait involontairement ; et sourit.


«Cilio Dell’ Arbero, maintenant que nous nous connaissons, j’espère que vous me ferez lire vos poèmes. L’art de manier les mots et de transformer les moindres phénomènes en prouesses lyriques m’a toujours fasciné. »

D’un mouvement lent, elle remit en place les pans de sa robe et ajouta, d'un ton calme doté d'un soupçon d'autorité innée.

« Mais le moment est mal choisi. Nous en reparlerons plus tard, je l’espère. »
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Cilio de
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleJeu 26 Jan - 22:32

*Faucon ardent, féroce colombe
Qui de ses ailes transperce les astres
Un seul coup de bec érige la tombe
De notre liberté, frêle proie du rapace...*

Les mots affluaient, tournaient, passaient et revenaient dans sa tête sans qu'il puisse les en empêcher. Comme si le barrage s'était d'un coup rompu, libérant les milliers de litres accumulés dans le lac surplombant la vallée de ses pensées... Le torrent vrombissait dans sa tête, il en avait presque mal au crâne, mais la douleur n'était rien à côté de l'euphorie qui petit à petit le gagnait tandis que les mots défilaient.

Et deux êtres, inconscients de la renaissance fulgurante qui s'opérait en Cilio, échangeaient des mots certes, mais ils paraissaient si pâles à l'oreille du poète tant ceux qui venaient à lui lui réchauffaient le coeur... Pourtant, la réalité était là, si proche, si belle à présent que son corps retrouvait son âme.

Cilio posa un regard indéfinissable sur son Prince lorsque celui-ci lui adressa la parole. Il le cherchait. Pour une affaire d'importance. D'importance! Ainsi, l'impression de déranger ne devait pas être fondée. A vrai dire, il lui aurait importé bien peu en cet instant que son impression soit ou non fondé, tant il était heureux de s'être retrouvé.

Il ne prit conscience du regard d'Angelica sur lui que lorsqu'elle le détourna. Ce constat eut tout de même pour effet de lui rappeler brusquement qu'il n'était pas seul et que, âme ou pas dans son corps, il devait se tenir dignement et paraître de bonne compagnie. Du moins, pas trop désagréable.

La seule chose qu'il retint finalement du regard d'Angelica, c'est le sourire et les paroles qui suivirent. Il sourit en retour, le genre de sourire qu'il n'avait pas abordé depuis longtemps.
A moins que... Sa mémoire lui rappela sa rencontre avec Luigi, quelques heures plus tôt. Souvenir qui rendit son sourire d'autant plus franc, bien que légèrement assombri un instant plus tard à la pensée des réprimandes de la tante di Grazziano.


" Signora, répondit Cilio à la proposition de l'Angelica, si l'occasion se présente en effet, j'espère que vous prendrez au moins un peu de plaisir à la lecture de mes modestes compositions. "

Puis il se tut, à la fois par crainte d'éveiller l'agacement chez la jeune femme - les hommes qui parlent trop étaient rarement bien vus - et parce qu'il n'avait simplement rien à ajouter. Se tournant légèrement vers le Prince, il put déceler dans ses yeux un air songeur, remplacé l'instant d'après par son habituel sourire posé et rassurant. Poliment, il attendit que son Prince daigne prendre la parole.
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Coriolan
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleJeu 26 Jan - 23:39

Coriolano laissa la conversation entre les deux jeunes gens se terminer avant de reprendre la parole. Ce qu'il allait maintenant proposer était le premier élément du feu d'artifices qui se déroulerait dans la soirée. Aussi était-il capital - primordial, même - de ne pas effaroucher le poète, ou qui que ce fut d'ailleurs. Même si l'impatience poussait le prince à pianoter sur l'accoudoir de son fauteuil, il se contenta de relever la tête pour contempler le plafond. Une jeune femme vêtue d'une robe bleue toute simple lui renvoya son regard peint, légèrement nostalgique, dans lequel il crut lire un reproche.

*Non. Je ne trahirai ni ma maison ni Venise. Et encore moins mon rival. Alors ne me jugez pas trop vite.*

Le hasard récompensa la patience d'Coriolano. Angelica évoqua l'idée d'écouter les compositions de Cilio et Coriolano jubila intérieurement. A peine entrée dans le palais, et l'aventurière daignait déjà jouer sur l'échiquier de la maison Di Grazziano.

"Angelica, ma chère, je peux affirmer sans grand risque d'erreur que votre souhait sera bientôt réalisé. Laissez-moi vous expliquer la situation. Mais avant toute chose..."

Le Prince actionna une petite sonnette qui fit surgir un domestique après quelques instants. Coriolano lui chuchota quelques mots à l'oreille et le garçon s'éclipsa pour revenir avec une coupe de fruits qu'il déposa sur la table basse. Le prince étendit le bras pour saisir une pomme qu'il considéra un instant avant d'en croquer un morceau.

"Je vous en prie servez-vous, si le coeur vous en dit. Et ne tournons pas plus longtemps autour du pot. Voici en quoi consiste l'affaire. Ma soeur m'a invité ce soir à une pièce musicale qu'elle donne chez elle..."

Coriolano s'interrompit pour prélever une nouvelle bouchée du fruit. Il ne doutait pas qu'Angelica et Cilio saisirait immédiatement les implications de ce qu'il venait de dire, mais mieux valait ne pas les presser.

"Ainsi donc, je vais avoir l'honneur de rencontrer mon beau-frère, le Prince Elio Lacryma Adorasti. En une si noble occasion, j'ose espérer que vous m'accompagnerez, ainsi que d'autres membres de la maison. Je tiens absolument à ce que vous rencontriez un si illustre personnage."

Il s'interrompit à nouveau pour terminer la pomme et déposa le trognon qui commençait déjà à brunir sur la table. Puis, il se laissa couler dans le fauteuil, les bras croisés et, avec toute la sérénité du monde, décocha sa première flèche.

"Une personne de si haut lignage qui nous fait l'honneur de sa table mérite un remerciement de taille. Cilio, j'aimerais vous charger d'une tâche d'importance. Choisissez un poème, quel qu'il soit, celui que vous préférez, celui que vous avez pris le plus de plaisir à composer. J'aimerais que, à la fin de cette pièce, vous nous fassiez l'honneur de le réciter devant l'assemblée."


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Angelica
Invité




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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleVen 27 Jan - 20:44

Une soirée chez les Adorasti ? Angelica comprenait évidemment les raisons diplomatiques qui poussaient le Prince Elio Lacrima Adorasti à ne pas rejeter ouvertement la présence des Grazziano. Mais elle restait néanmoins ébahie par l’ampleur de l’hypocrisie qui régnait à Venise. On se conviait à des soirées et on s’assassinait par derrière. L’aventurière ne se sentait pas, quant à elle, réellement plus attachée aux Grazziano qu’aux Adorasti mais le destin avait voulu qu’elle se retrouve dans cette maison plutôt qu’une autre.
Elle recevait donc ces informations avec un certain détachement. Peu lui importait, après tout, les petites magouilles des uns et des autres. Cette guerre ne la concernait pas. Du moins pas encore.
Cependant, pour survivre, elle avait appris que seule comptait l’adaptation. Et ici, s’adapter signifiait, déjà, connaître les personnes haut-placées.


« Ne craignez-vous pas de troubles durant cette soirée ? J’arrive à peine, mais il ne m’a pas échappé que les tensions entre les Grazziano et les Adorasti semblent toujours aussi fortes… »

Elle doutait que ces masques de bienséance qu’étaient les Vénitiens puissent s’adonner à des jouxtes à une soirée telle que celle là ; ceci dit, un empoisonnement, ou une traîtrise quelconque, même "propre et sans bavure", risquait de déclencher le feu aux poudres.
Elle avait comme un pressentiment, cette soirée serait beaucoup plus importante que les précédentes. Ceux qui tiraient les ficelles devaient concentrer tous leurs efforts sur cette soirée. Ugo ne devait rien laisser au hasard. Si tout était calculé, quel rôle donc Cilio avait-il à jouer ? Qu’est-ce que le Prince attendait, au delà du geste honorifique ? Elle ajouta négligemment,


« Cela dit je ne doute pas que les vers de sieur dell’Arbero, que vous semblez porter en grande estime, sauront apaiser les rancœurs le temps d’une soirée...»

Il était inutile de demander des éclaircissements à Ugo sur le rôle qu’il voulait voir le jeune homme jouer. Il était évident qu’il lui répèterait poliment que les hommages n’étaient pas de trop pour un seigneur tel qu’Elio Lacryma Adorasti. Et, après tout, peut-être était-elle encore tout simplement en train de se compliquer la vie.

Elle saisit vivement une pomme, et farfouilla dans un pan de sa robe. Elle en sortit un long couteau, fin et aiguisé, finement orné. D’un geste incisif et habile, elle le trancha en 4. Avalant délicatement le premier quart, elle déclara ;

« Quoi qu’il en soit, je serai heureuse de me rendre à cette pièce musicale… »

La jeune femme espérait se rendre compte rapidement des alliances et de la situation par elle-même ; afin de choisir la voie dans laquelle elle voulait s’engager.

« … j’ai toujours aimé les pièces musicales. »

Elle sourit.
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Cilio de
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleSam 28 Jan - 21:52

Cilio ne put s'empêcher de froncer légèrement les sourcils lorsque le Prince déclara son intention de se rendre à une soirée tenant lieu chez les Adorasti. Bien que fuyant les conflits, Cilio connaissait les règles du jeu. L'avancement des pions, la tentation du coup fatal, jusqu'à se retrouver pris au piège par mégarde, ou au contraire par une attention trop focalisée. Echecs et mat.

Le jeune poète ne craignait pour lui-même, mais pour son Prince et sa maison. Venise n'était pas peuplée d'enfants de choeurs, il en était largement conscient bien qu'accablé par cette haine insensée. Il savait qu'ésperer une amélioration des relations entre les deux maisons était chimérique, mais son esprit était formé tel que dans la situation la plus critique il aurait continué à penser que l'espoir persiste. Sa difficulté à apaiser des émotions trop fortes, qui parfois laissaient filtrer une sensation de déspespoir total, n'éradiquait pas sa nature profonde. Optimiste dans l'âme, Cilio? Etonnant pour un poète. Pourtant, il n'y avait aucun doute sur le fait qu'il croirait toujours en l'amour.

Il ne put empêcher ses yeux de s'élargir à la demande du Prince. Les paroles d'Angelica eurent pour effet de faire à nouveau monter le rouge à ses joues: lui, Cilio Dell'Arbero, tenu en grande estime par le Prince? Il ne comprenait pas la raison qui avait poussé le Prince à lui demader un tel service. Voulait-il simplement montrer l'amour de sa maison pour les Arts? Non, Cilio sentait dans l'attitude du Prince que son rôle était d'un autre ordre. L'héritier di Grazziano paraissait tenir entre ses doigts la partition du drame qui allait se jouer quelques heures plus tard; et depuis son estrade, il distribuait méthodiquement les rôles, instruisant chacun du moment précis auquel il devra faire son entrée. Un instrument mal accordé, un musicien mal informé et c'était le morceau entier qui s'écroulait. Une belle pièce musicale, oui... Et Cilio venait d'être convié à en jouer l'une des funestes notes.

Il n'aimait pas cette idée d'être impliqué dans une pièce destinée à nuire. Mais il ne pouvait s'opposer à la volonté de son Prince. Il se devait de défendre les di Grazziano, aux dépends de son propre mépris face au terrible conflit des deux maisons.


" Mon Prince, je... Je suis particulièrement touché de la confiance que vous m'accordez. Je tâcherai d'être à la hauteur. "

Sa voix était restée neutre, presque inexpressive. Tout comme Angelica, il savait qu'il était intuile de poser plus de questions. Il en saurait davantage bien assez tôt...

C'est en cet instant précis que, bêtement, une envie lui prit - le genre d'envie qu'on ne peut refouler même par un grand effort de volonté. Cilio se leva brusquement, s'inclina vers les deux jeunes gens en balbutiant:


" Pardonnez-moi, je reviens dans un instant. "

Puis il sortit de la pièce avant de perdre totalement contenance.

[Les cabinets de la maison Grazzi]
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Coriolan
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleMar 14 Fév - 19:41

Coriolano esquissa un sourire... tant d'ambition et tant de candeur toutes ensembles réunies. Si Cilio jouait convenablement son rôle, la soirée serait bien plus animée que tous les divertissements auxquels le prince avait assisté jusque là depuis son retour du nord de l'Europe.
Déjà, le soleil s'était mis à décliner. Les rayons dont certains se faisaient fauves semblaient tous pointer vers la tour d'ivoire où se tenait celui dont les circonstances avait fait son ennemi, ainsi que sa soeur. Sa si chère, si précieuse, si dangereuse petite soeur.
Il y avait encore tant à faire, tant à préparer avant une si noble occasion. Coriolano se tourna vers son amie.


"Je ne vais hélas pas pouvoir m'attarder, ma chère. Tellement d'affaires m'appellent avant ce soir. Mais c'est entendu. Vous assisterez avec nous à la pièce des Adorasti. Juste une chose, un conseil : faites et dites absolument tout ce qui vous plaira. Je me porte garant de votre sécurité. Profitez-en, mes crises de générosité ne durent jamais bien longtemps."

Un étrange rictus se dessina sur le visage du prince. Lentement, le sourire s'étendit. La comissures des lèvres, les joues, les pomettes... Même les veines du cou semblaient saillir sous l'effet de cette terrifiante grimace. Puis, comme elle était venu, l'atroce expression se dissipa.

"A ce soir, donc." conclut-il avant de s'éclipser sans autre forme de procès.


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Cilio de
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleMer 15 Fév - 20:12

[Les cabinets de la maison Grazzi]

Quelques minutes plus tard reparut un Cilio dont l'expression avait repris sa rêverie habituelle, bien qu'un léger rosé soutenait encore ses pomettes. Il s'étonna de ne pas trouver le Prince dans la bibliothèque et se gifla mentalement d'avoir eu une telle envie dans un moment aussi critique. Son regard s'attarda sur la jolie Angelica. La franchise de la jeune femme en faisait une compagnie des plus agréable pour Cilio, fatigué des hyprocrisies et des sous-entendus. Malheureusement, il ne pouvait s'attarder. Le Prince avait formulé sa requête et l'heure avançait.

Le jeune homme salua donc courtoisement la Signora Visconti.


" Je suis ravi d'avoir fait votre rencontre, Signora. La demande du Prince m'oblige à vous quitter. J'espère que nous pourrons nous entretenir à nouveau lors de la soirée ou à une autre occasion. Passez une bonne soirée ", dit-il avec un sourire sincère.

Sans hâte ni lenteur, Cilio s'éclipsa de la pièce et se dirigea vers les escaliers. L'obscurité de la nuit commençait à menacer et l'on n'allait pas tarder à voir apparaître les premiers feux des lampadaires; il n'y avait pas de temps à perdre.


[La suite de Cilio Dell'Arbero]
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Angelica
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleJeu 23 Mar - 21:24

Angelica regarda les deux jeunes hommes s'éclipser. Elle se sentait mieux. Le brouillard qui s'était abattu lentement sur elle peu avant cette entrevue ne s'était pourtant pas levé. Bien au contraire, il s'était fait si dense, que la jeune femme en était tout engourdie. Elle ne voyait plus autour d'elle. Une nouvelle période s'annonçait pourtant, si proche d'elle. Mais la jeune femme était maintenant plongée dans ce milieu ; Venise l'avait reprise.

Elle eut un étrange sourire, qu'elle même n'aurait su interpréter. Un de ces sourires que lance notre subconscient à un avenir dont notre esprit saisit la dimension, sans juger bon de nous en informer.

Elle s'aprocha d'une glace et regarda un instant son reflet. Le choc des années passées l'effleura à peine. Elle remit en place sa robe et se recoiffa rapidement. Satisfaite, elle sortit à son tour, prête à se rendre à cette fameuse soirée...


[Embarcadère Ca'Adorasti]
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Coriolan
Invité




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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleSam 24 Mar - 15:53

[Le lendemain - La roseraie]

Quelques valets l'ayant vu passer en courant, deux personnes s'étaient précipitées à leur tour. Ils avaient ouvert la porte et s'affairaient à suivre les ordres rapidement lancés par Coriolano. Déplacer l'ottomane près de la cheminée, raviver le feu, apporter des coussins et de l'eau chaude.

Délicatement, le Prince avait posé sa sœur sur l'ottomane près du feu. Il délaça rapidement robe et corset et dégagea la tête de manière à ce qu'elle puisse respirer sans mal.

Il fallait un médecin. Mais pourquoi n'y en avait-il qu'un seul dans cette ville ? Pourquoi fallait-il qu'il confie sa sœur à ce traître... D'ailleurs, peut-être qu'il savait très bien que Bianca allait mal. C'était possible cela. Barrozi avait déjà examiné Bianca. Il avait dit que tout allait bien. Mais peut-être savait-il qu'elle referait une crise aujourd'hui ? Parce que très clairement, elle n'allait pas bien.
Peut-être avait-il fait exprès de disparaître de chez lui, prétextant un faux rendez-vous, pour qu'elle n'ait pas de soin et qu'elle meure ici, là, maintenant...

Non, non. Bianca n'allait pas mourir. Et il allait trouver le médecin. Et Barrozi serait bien obligé de guérir sa soeur. Il ne pourrait pas la laisser ainsi s'il la voyait, ce serait trop cruel... Même un traître avait un coeur et il suffisait de voir la pâleur de Bianca pour avoir envie de lui porter secours.

Il se tourna vers le valet qui apportait de l'eau chaude mêlée de lait.
"Vous, filez chez le Médecin, Calle Bardini. S'il y est, amenez-le ici tout de suite. Sinon laissez un message et revenez."

Il ne pouvait pas envoyer quelqu'un Ca'Adorasti. Ce serait avouer qu'il savait que le médecin était à la solde des Adorasti...
Encore pire, si Barrozi n'y était pas, ses soupçons seraient insultant pour la nouvelle famille de Bianca comme pour le médecin.

Oui, mais si Bianca mourait alors qu'il aurait pu trouver le médecin à temps ? Devait-il réellement sacrifier sa soeur pour la politique ?
Non, il y avait peut-être une solution intermédiaire... Coriolano fit signe au valet qui arrangeait une courtepointe sur les pieds de Bianca de cesser son travail.

"Pietro, laissez, allez Ca'Adorasti et faites savoir à qui de droit que la Princesse a eu un malaise et qu'elle ne pourra donc sans doute pas rentrer à l'heure qu'elle avait annoncée. Mais qu'il serait sans doute bon de préparer une chambre de convalescente pour son retour. Ne traînez pas en route, s'il vous plaît."

Coriolano congédia les autres valets. Il valait mieux que Bianca soit entourée de calme. Il prit un linge et le trempa dans l'eau avant d'en tamponner doucement le visage de sa soeur.
Elle avait l'air si lointaine...


"J'imagine, Madame, que vos talents ne vont pas jusqu'à la science médicale ?"

Les paroles destinées à Annavera se voulaient légères, mais le ton un peu las et inquiet ne pouvait pas tromper l'aventurière.


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Annavera de Luca
Comtesse - Ca'Grazziano
Annavera de Luca


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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleLun 26 Mar - 23:56

Annavera suivit le Prince et assista en retrait aux ordres donnés d’une voix nette.

Puis elle le vit s’approcher de sa sœur et lui passer délicatement un linge sur le visage. La jeune femme était toujours aussi pâle.
"J'imagine, Madame, que vos talents ne vont pas jusqu'à la science médicale ?"
Ces paroles sortirent Annavera de sa torpeur. Le Prince était inquiet… Très inquiet. Elle ne l’avait jamais vu dans un tel état. Plusieurs choses avaient dû se passer pour le rendre aussi fatigué et tendu.


« Vous m’en voyez navrée Prince, répondit-elle. A part l’usage de quelques simples, le domaine médical ne m’est que peu familier. En revanche… »

Que se passe-t-il vraiment ? aurait-elle voulue lui demander.

Elle se rapprocha de la Princesse callée dans le siège concave. Effleurant sa main, elle constata qu’elle était toujours aussi froide. Puis elle releva la tête et croisa le regard d’Ugo di Grazziano. Que pouvait-elle pour lui ?


« Vous m’avez fait une proposition qui m’a menée jusqu’ici…, lui rappela-t-elle à voix basse afin de ne pas déranger la dame. J’ai décidé de l’accepter, Prince. Mais si vous voulez que je vous sois utile, il vous faudra me donner quelques précisions... »

Autrement je risque de ne pas être très efficace…

« Je sais certaines choses mais j’en ignore d’autres. »

Par exemple, pourquoi votre soeur était-elle si furieuse ?

« Pardonnez mon indiscrétion Monsieur, reprit-elle, mais je crois comprendre que vous avez quelques inquiétudes…»

Inquiétudes ? Le mot était faible.

« Je ne devrais peut-être pas vous dire cela mais quand j'ai aperçu votre soeur tout à l'heure, elle m'a semblée être la proie de de vives agitations…»

Et pour finir, pourquoi l’avez-vous laissé sortir seule ?
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Annavera de Luca
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleMar 3 Avr - 13:03

Ne voulait-il donc pas lui répondre ? La jeune femme avait-elle été trop indiscrète ? Avait-elle oubliée sa place ? Et pourtant…

Elle s’éloigna des grandes flammes claires qui occupaient à présent la cheminée. Bianca était toujours évanouie dans le fauteuil et l’on aurait pu la croire privée de vie si ce n’était cette mince respiration qui soulevait sa poitrine. Le Prince reprit le linge et le trempa dans l’eau. Puis il le repositionna sur le front de sa sœur.

Il allait enfin répondre à ses interrogations quand trois coups furent discrètement frappés à la porte. Un valet entra et annonça l’arrivée de la Princesse di Grazziano. Le Prince se leva d’un geste vif et la scruta. Qu’allait-il lui demander ?

Quand la porte du petit salon se referma sur lui, Annavera eut un léger haussement de sourcils. Il venait de lui demander de prendre soin de sa sœur tandis qu’il allait accueillir son épouse. Avec des gestes mesurés, elle tira un fauteuil près de l’occitane où reposait la Princesse Adorasti. Elle s’y installa confortablement et replaça le linge humide sur les boucles blondes.
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Muzio Barrozi
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleLun 28 Mai - 13:38

[Calle Bardini - La Maison du Médecin - Etage Inférieur - Salon-Bibliothèque]

La Princesse avait-elle été saisie d'un nouveau malaise ? Telle était la question qui occupa l'esprit de Muzio durant le court trajet qui le mena Ca'Grazziano. Le valet qui lui ouvrit le reconnut, et le médecin songea que bientôt les visages des deux grandes maisons lui seraient familiers. On le mena dans un petit salon, où il reconnut une jeune femme entrevue dans la matinée et... Bianca, allongée, inconsciente. Bon sang. Il l'avait déjà examinée deux fois en deux jours.

Il salua brièvement la brune consciente, s'approcha de la blonde évanouie. D'un regard, il s'assura que le feu était vif et l'ottomane suffisamment proche. Il enleva le linge du front de la Princesse, testa la température, le pouls, fronça les sourcils. Il essaya de la ramener à la conscience par divers moyens qui échouèrent tous. La ride se creusa entre ses yeux. Il se redressa, donna quelques instructions rapides et sèches à la femme présente: faire amener de l'eau tiède, des linges, une couverture, des chandelles, s'éclipser et faire garder la porte. Ses consignes furent respectées, et lorsqu'il se retrouva seul penché au-dessus de Bianca, son sang battait un peu plus fort dans ses tempes, comme pour l'avertir que son pressentiment allait se vérifier.

Ses gestes toutefois restèrent parfaitement maîtrisés, rapides, doux et fermes. Il entreprit de débarrasser la jeune femme des diverses couches de jupons qui l'entouraient. Le dernier, le plus proche du corps de la Princesse, était marqué de rouge.

Il se redressa, recouvrit les jambes de porcelaine, marcha à la porte, l'ouvrit et s'adressa au valet qui la gardait:


« Vous allez me préparer un café fort et un bouillon nourrissant dans lequel vous ajouterez trois gouttes de laudanum, vous avez ça ? Bon. Laissez ça sur ce guéridon, là. Pas de bruit, pas de dérangement. Merci. »

Il referma la porte, retourna à la Princesse, écarta définitivement le corset, toucha le ventre. De l'autre côté du mur, face à la porte refermée, une paire de sourcils se fronça et bientôt le bruit courut dans les cuisines que tout n'allait pas pour le mieux dans le petit salon. Une vieille servante esquissa le signe de croix.

Au chevet de la Princesse, Muzio sentait la moiteur gagner ses mains. La conclusion qu'il tirait de son examen le laissait désorienté. Comment diable... ?

Pourtant il fallait agir. Agir vite. Oui, mais sans comprendre ? Sans comprendre. Il n'avait pas le choix.

Il commença par nettoyer à l'eau tiède les lieux de l'hémorragie. Il ouvrit alors sa trousse, saisit des pinces, observa avec soulagement que sa main ne tremblait pas, respira un bon coup et se lança. Après plusieurs longues minutes, un filet de sueur glissait sur sa tempe gauche. Enfin, il jeta ses instruments dans la bassine, lava les jambes et le ventre de la jeune femme inanimée, ses propres mains.

Il entrouvrit la porte, attrapa la tasse de café qui l'attendait, la vida d'un trait, la reposa. Le valet hésita un instant avant de demander: "Monsieur ? Comment se trouve la Princesse ?". Muzio le fixa profondément, puis l'ombre d'un sourire passa sur son visage:
« Elle se remettra. » Il referma la porte en emportant le bouillon. Dans les cuisines, les bavardages reprirent, soulagés. Une vieille servante esquissa le signe de croix.

Revenu près de Bianca, le médecin la rhabilla délicatement, laissant de côté le corset et le premier jupon. Bien sûr une servante aurait dû le faire, mais il fallait que la Princesse soit la première à savoir. Il la couvrit avec la couverture, déposa le bol de bouillon près du feu.

Enfin, il s'approcha de Bianca, observa son visage d'un oeil impénétrable, repoussa doucement une boucle blonde.


« Vous m'en réservez beaucoup, des surprises comme celle-ci ? » murmura-t-il.

Il glissa un coussin sous ses épaules, un autre sous ses pieds, puis il prit sa main et la serra légèrement:


« Madame ? C'est le docteur Barrozi. M'entendez-vous ? »


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Bianca Grazziano Adorasti
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleLun 28 Mai - 16:54

[La roseraie]

C'était la deuxième fois en moins d'une journée que Bianca se réveillait dans une pièce sans avoir le souvenir d'y être venue s'installer. C'était la seconde fois qu'elle se réveillait, l'esprit embrumé et sans force avec un visage penché au-dessus du sien ; à la différence près que cette fois-ci, elle ne ressentait pas de nausée, certainement dû au fait que personne ne lui avait fait respirer de sels nauséabonds.

"Où suis-je...?" murmura-t-elle dans un effort qui la laissa essoufflée quelques secondes, luttant pour ouvrir les paupières. Même ses bras semblaient ne pas pouvoir se décoller de l'ottomane. Tout était si lourd et fatiguant.

A la différence aussi qu'à son dernier réveil, les circonstances de son évanouissement étaient extrêmement floues dans son esprit, pour une raison qu'elle ignorait encore. Cette fois-ci, c'était différent. Elle revoyait parfaitement le jardin, la rose, les fenêtres du palais et... cette douleur.

La princesse sursauta violemment à ce souvenir et se mit à trembler. Cette douleur violente, fulgurante qui l'avait terrassée. Elle était tombée, elle avait dû s'évanouir... encore. On l'avait menée ici et... le médecin était là. La princesse sembla le voir juste à l'instant.


"Maître Barozzi..."

Ses tremblements diminuèrent sans cesser totalement. Elle ne ressentait plus cette douleur terrifiante... tout au plus un léger élancement lointain, en rien comparable à ce qu'elle avait ressenti. Bianca sentit qu'il lui tenait la main alors elle serra légèrement ses doigts engourdis autour des siens comme pour se raccrocher à la seule personne qui pouvait l'aider dans l'instant.

"Maître Barozzi... répéta-t-elle. Suis-je gravement malade ?" demanda-t-elle avec difficulté tant l'angoisse lui nouait la gorge.

S'évanouir deux fois en si peu de temps alors qu'elle n'était guère sujette à ça avant, et cette douleur inexpliquée survenant sans prévenir, cette fatigue constante... L'idée qu'elle avait attrapé une de ces maladies qui vous rongent sournoisement s'imposa à son esprit.

Elle frissonna de nouveau, prenant conscience de la pièce où elle se trouvait et agrippa la couverture de son autre main pour la serrer contre elle comme si elle craignait qu'elle ne glisse à terre.
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Muzio Barrozi
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleLun 28 Mai - 17:23

Muzio resta silencieux tout le temps que dura le réveil de la Princesse, s'efforçant d'afficher un air rassurant. Les premiers mots angoissés qui franchirent les lèvres de Bianca lui arrachèrent un sourire. La question habituelle. D'ordinaire, c'était pour lui un véritable moment de joie de répliquer que non, au contraire, tout allait bien et même mieux, la vie gagnait une fois de plus ! Là cependant... Mais il ne fallait pas gâcher l'annonce.

Gardant les doigts froids de Bianca entre les siens, il lui sourit en toute sincérité:


« Non, Madame, non, vous n'êtes pas malade. Une grande joie vous attend au contraire... Vous attendez un enfant. »

Il laissa passer quelques secondes, afin de laisser la toute jeune femme assimiler la nouvelle. Mais il s'agissait maintenant de passer à la suite. Il cacha les troubles qui l'agitaient et reprit:

« Et, savez-vous, ce petit est déjà farceur ! »

*Mon Dieu !*

« Il a grandi... à l'insu de tous. Il a déjà près de huit mois ! »

*Saint Tact, venez à mon aide !*

Il sourit bravement.

« Il - ou elle ! - se porte très bien. Vous aussi, vous allez vous remettre bien vite. Simplement, il vous faudra bannir ceci, il désigna le corset, pendant quelques temps ! »

Il marqua une nouvelle pause, puis reprit avec bienveillance:

« C'est étrange, je vous l'avoue. Je comprends que vous soyez sous le choc, moi-même je ne comprends pas très bien. Mais vous devez penser à vous, à cet enfant, et d'ici un mois tout se passera très bien. Je vous le promets. »
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Bianca Grazziano Adorasti
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleLun 28 Mai - 18:08

Trop angoissée par l'attente de la réponse du médecin qui allait certainement lui annoncer une mauvaise nouvelle, Bianca avait refermé les yeux et n'avait pu donc voir ni l'air rassurant de Muzio ni son sourire qu'avait fait naître sa question. Elle se contentait de continuer de serrer la main chaude de l'homme pour l'assurer qu'elle l'écoutait malgré tout et qu'elle se tenait prête à toute éventualité.

Non. Ce fut ce mot qu'elle entendit en premier et qui enleva ce poids qu'elle portait sur la poitrine et qui l'empêchait de respirer normalement. Soupirant de soulagement, elle n'intégra que quelques secondes après la suite de l'annonce. La princesse rouvrit les yeux et regarda le médecin fixement.


"Quoi ? demanda-t-elle doucement. Un enfant...?"

Battant des paupières, un léger sourire apparut lentement sur ses lèvres. Oui, un enfant, ça expliquait les malaises, la fatigue, pourquoi ne pas y voir pensé plus tôt... Un enfant, un... Son sourire diminua aussi progressivement qu'il était apparu.

"Mais.. vous devez vous tromper..." tenta-t-elle d'expliquer, l'air presque déçu.

Il était délicat d'annoncer à un homme, tout médecin qu'il soit, qu'elle avait fermé la porte de sa chambre au prince Elio il y a de cela plusieurs mois déjà. Malgré cela, elle lui était restée fidèle et n'avait eu aucune aventure, aussi courte soit-elle. A moins d'avoir été touchée par la Grâce telle la Sainte Vierge, être enceinte lui était impossible à l'heure actuelle.

Ne quittant plus le regard du médecin pour tenter de trouver une explication, la princesse écouta avidement la suite de ses paroles. Un hoquet de stupeur s'en suivit, l'enfonçant d'autant plus dans de nouvelles interrogations jusqu'à ce qu'elle trouve elle-même l'explication.


"Maître Barozzi... l'heure est vraiment mal venue pour la plaisanterie... J'apprécie le tact que vous déployez pour me ménager mais je vous prie de cesser cela et de me parler sans détour. Si je suis malade et que je dois mourir, dites-le moi, je le supporterai mieux que de rester dans l'ignorance. Dites-moi ce que c'est... la petite vérole, la tuberculose ?"
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Muzio Barrozi
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleLun 28 Mai - 19:34

Le coeur de Muzio s'était mis à battre un peu trop vite pendant qu'il cherchait à expliquer l'inexplicable à la Princesse, mais il se calma rapidement face à la réaction de celle-ci. Il voyait mal comment il aurait pu plaisanter à ce sujet, mais si là était la seule appréhension de la jeune femme...

Muzio rit. Oh ce fut bien fugitif, mais il rit et toute la tension qu'il avait accumulée se libéra. Il se reprit, décocha un regard mi-amusé, mi-vexé à Bianca:


« Oh mais je ne plaisante pas ! Vous n'êtes pas malade, vous êtes enceinte ! Vous n'allez pas mourir, vous allez donner la vie ! »

Ses yeux reprirent leur expression sérieuse:

« Vous me croyez, n'est-ce pas ? Ecoutez... »

Il s'interrompit, chercha ses mots.

« Ecoutez, je ne comprends pas bien moi-même... Je vous ai examinée hier, ce matin, rien dans votre état ne permettait de déceler quoi que ce soit. Vous-même... vous ne saviez pas, n'est-ce pas ? Et pourtant... Vous portez un enfant depuis huit mois, à peu près. »

*Bon sang...*

Il désigna de nouveau le corset:

« Ceci a mis en danger vos deux vies. Mais vous allez mieux, maintenant. Tous les deux. Vous allez vous apprivoiser, et puis dans un mois, vous ferez connaissance. Vous allez être mère. »

Au cas où vous n'auriez pas compris. Muzio, tu es le roi de l'annonce.

« Vous avez sans doute eu des... des signes ? Pardonnez-moi, j'ai besoin de savoir... »

Pour ne pas l'oppresser, le médecin dégagea doucement sa main de celle de la Princesse et alla chercher le bol de bouillon qu'il lui tendit:

« Voulez-vous boire ? Il y a un peu de pavot, cela soulagera d'éventuelles douleurs... »

Il attendit un peu, puis demanda doucement:

« Voulez-vous faire prévenir quelqu'un dès maintenant ? »
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Bianca Grazziano Adorasti
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleLun 28 Mai - 21:56

La respiration courte mais rythmée de Bianca s'accéléra quand elle entendit le médecin rire. Elle le connaissait peu mais tout de même il ne rirait pas si sa vie était en danger.. elle n'était donc pas malade. Mais qu'avait-elle alors ? Cette explication absurde de grossesse de huit mois était loin de toute réalité. D'ailleurs il riait sûrement de sa bonne blague.

Pourtant... il insistait. Elle allait donner la vie, c'est ce qu'il disait. Elle était enceinte, soit. Elle avait neuf mois devant elle pour tenter de comprendre comment elle y était parvenue. Elle se sentait maintenant obligée d'avouer.


"Maître Barozzi... vous devez certainement vous tromper... Il y a des mois que.. le Prince Elio et moi-même... enfin, cela fait très longtemps que nous n'avons rien tenté pour avoir un enfant."

Le regard de la princesse se perdit un instant dans les flammes de l'âtre. Tout ça était vraiment étrange. Elle tourna de nouveau les yeux vers Muzio quand il reprit la parole. Il l'avait examinée hier et le matin même, mais superficiellement... il n'était pas forcément évident de déceler un début de grossesse. Quant à elle, elle l'apprenait par un médecin après un malaise, rien d'anomal... Quoique.. d'où venait cette douleur qu'elle avait ressentie ? C'était le deuxième point qui la laissait perplexe.

Alors qu'elle essayait de démêler ces deux noeuds dans sa tête, Muzio remit sur le tapis le sujet qu'elle avait déjà balayé de son esprit. Le regard abasourdi de la princesse se posa sur le médecin comme s'il le lui annonçait pour la première fois. Elle regarda le corset, puis Muzio et secoua la tête avec un sourire nerveux.


"C'est impossible... insensé et totalement surréaliste. Mais regardez-moi enfin, ai-je le profil d'une femme enceinte de huit mois comme vous le prétendez ? Je ne suis pas stupide au point de ne pas me rendre compte de cela !" s'exclama-t-elle, plus perplexe qu'en colère.

Les signes.. elle allait lui en parler justement. Mais elle devait d'abord reprendre son souffle. Elle le suivit des yeux et se redressa avec difficulté dans les coussins pour prendre le bol entre ses mains.


"Merci... Maître Barrozi, écoutez-moi... je ne met pas en doute vos compétences mais je peux vous assurer que vous faites fausse route. Il ne me semble pas avoir un ventre d'une taille convenable pour une grossesse qui serait à ce point avancée... et.."

Pourtant ces derniers temps, elle n'aimait plus l'image que lui renvoyait le miroir. Elle avait trouvé parfois que sa taille n'avait plus la grâce qu'elle avait avant.

"...et .."

Et Maria, la petite bonne qui s'occupait d'elle tous les matins pour l'habiller.. Bianca la voyait tous les jours hésiter à serrer son corset.

".. et... il y a aussi mon.. mon cycle féminin qui était à peu près normal..."

"A peu près". Plus elle parlait, moins elle se convainquait elle-même et cela se voyait à son expression de visage perturbé ainsi qu'à son regard qui se faisait plus vague.

"... plus précisément, j'ai été délivrée de ce désagrément pendant quelques temps il y a plusieurs mois.. J'ai d'ailleurs pensé à une grossesse à ce moment là... mais cela est revenu ensuite... un peu aléatoirement mais j'étais tellement anxieuse ces derniers mois que je n'y ai pas prêté plus d'importance que cela."

La princesse se plaqua la main sur le visage, visiblement perdue. Si elle acceptait ce que venait de lui annoncer le médecin, les deux problèmes précédents n'avaient plus lieu d'être : les visites d'Elio qu'elle refusait ces dernières semaines, et cette douleur qui finalement serait dû au corset. Deux problèmes résolus mais pour laisser place à d'autres, et pas des moindres.

La princesse Bianca Grazziano Adorasti, incapable de se rendre compte qu'elle est enceinte jusqu'à se mettre en danger, elle et son enfant. Mais qu'allait penser Ugo... et Elio ? Certainement qu'elle était simple d'esprit... et ils auraient peut-être raison.

D'ailleurs le médecin lui demanda qui prévenir. La honte qu'elle ressentait manqua lui faire dire "personne". Mais c'était absurde. Cela allait bien finir par se savoir tôt ou tard, il était inutile de repousser l'inévitable. Les yeux toujours perdus dans la danse enivrante des flammes de l'âtre, la princesse but quelques gorgées de bouillon et laissa la lassitude l'étreindre.


"Mon époux... et mon frère... ils doivent savoir." dit-elle tout bas en reposant le bol. Mais pour l'heure, elle était bien incapable d'expliquer à qui que ce soit une chose qu'elle ne comprenait pas encore.
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Coriolan
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleMar 29 Mai - 19:49

Coriolano avait dévalé avec légèreté les escaliers. Sa femme était installée, ses hôtes étaient occupés (très occupés même pour certain, s'il en croyait les bruits qui filtraient des portes). Il fallait qu'il retourne auprès de sa sœur.

La maladie étrange de Bianca était totalement imprévue, mais prendrait sans doute un rôle déterminant dans l'avenir. Il fallait simplement qu'il y réfléchisse. Quelle était la manière la plus pertinente de prendre en compte ce fait ? Fallait-il qu'il joue cette carte en attaque "vous ne savez pas prendre soin de ma sœur" ou bien fallait-il qu'il la garde comme un atout secret dans son jeu pour ensuite ériger Bianca en martyre ?

Coriolano haussa légèrement les épaules et sautant les dernières marches. Cela ne servait à rien pour l'instant. Il fallait d'abord savoir de quoi elle était atteinte. Parce que si l'on apprenait que c'était de la syphilis et qu'Elio n'en souffrait pas, c'était silence et étouffement de l'affaire qui prédomineraient...

Coriolano avait doucement poussé la porte du petit salon, au moment ou Bianca concluait. Bien, sa sœur était encore vivante et le médecin avait enfin daigné apparaître.
Son visage s'éclaircit et il avança vivement dans la pièce, non sans avoir pris soin de refermer la porte derrière lui.


"Bianca ! Vous êtes revenue à vous ! Que je suis heureux !"

Il posa délicatement une robe de chambre sur les épaules de sa sœur et s'assit à côté d'elle avant de lever les yeux vers le médecin.

"Vous avez pu venir... Vous avez pu voir que ce n'est rien, n'est-ce pas ? Qu'est-ce qu'il faut que votre époux et moi-même sachions, Bianca... Rien de grave, n'est-ce pas ?"

Il avait le ton et l'expression d'une personne morte d'inquiétude, mais qui ne veut pas le montrer ouvertement pour ne pas inquiéter son entourage. Envers le médecin, rien de ses soupçons, rien de plus que son habituelle confiance.


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Muzio Barrozi
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleVen 1 Juin - 23:18

Les confidences arrivaient, et Muzio comprit que cela ne devait pas être spécialement agréable de révéler ses déboires conjugaux à un homme rencontré la veille, même médecin. Il s'abstint donc de répondre à cette évocation. Il suffisait simplement d'une fois, huit mois auparavant... Mais c'était tellement... surréaliste, comme disait la Princesse ! D'autant plus si... Mais pas insensé. Il ne pouvait s'être trompé. Bianca elle-même finit par capituler. Il tâcha de rester le plus bienveillant possible.

« Je ne comprends pas tout non plus, c'est la première fois que... que je vois cela. Mais le fait est là. »

Bien là, même.

« Et croyez-moi, cet enfant-là... »

Il fut dispensé de qualifier le tempérament de cet enfant-là par l'ouverture de la porte. Les derniers mots de Bianca eurent tout juste le temps d'arriver à son cerveau. L'époux... Le frère... Le frère ! Car c'était celui-là, sans l'ombre d'un doute, que la Princesse désignait. Il l'observa en silence manifester sa tendresse envers sa soeur. Vous allez avoir un neveu. Ou une nièce. Ô joie.

Muzio ne se sentait pas à l'aise. D'abord, il sortait d'une opération délicate et le café qu'il avait avalé ne lui avait pas rendu toute sa placidité. Ensuite, ce qu'il avait... découvert, il ne le comprenait pas. Une grossesse de huit mois et personne ne s'en était rendu compte, pas même lui ! Et puis... les explications qu'il faudrait donner. Convaincre, justifier son non-diagnostic de la veille, expliquer ce qu'il ne comprenait pas. Il était écrit que la vie vénitienne de Muzio Barrozi serait faite de dilemmes.

En attendant, il ne laissait rien paraître de ses tourments - la future mère (diable !) n'ayant pas besoin de cela pour en connaître. Spontanément, il laissa de côté également le visage illuminé qu'il revêtait pour annoncer les heureux évènements. Il ne sut finalement que garder dans le registre des sentiments, et s'entendit annoncer paisiblement:


« Rien de grave, non, mais quelque chose d'importance tout de même ! Votre soeur attend un enfant. »

Votre épouse attend un enfant. La Princesse Adorasti attend un enfant. Eh oui. Mais si ce n'était que cela ! Il plongea son regard dans les yeux clairs d'Ugo. Il ne prit pas, cependant, un ton solennel qui aurait rapproché l'annonce de celle d'une maladie honteuse.

« Depuis huit mois. »
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleDim 3 Juin - 1:33

Bianca apprécia la discrétion du médecin qui ne fit aucune remarque sur ce qu'elle venait de lui avouer. Il était vraiment différent de Maître Treviano, et c'était appréciable. Il essayait de la comprendre mais jamais il ne mit en doute sa bonne foi ni son intelligence, du moins à haute voix. Qui savait ce qu'il pensait au fond de lui ? La princesse elle-même ne savait quoi penser d'elle.

A peine achevait-elle de répondre au médecin que quelqu'un entra dans la pièce, lui faisant tourner le regard en direction de la porte. Bianca regarda son frère s'avancer vers elle avec un mélange de sentiments, du soulagement, mais aussi de l'appréhension, beaucoup d'appréhension. Elle était en train de vivre une situation qui la dépassait totalement, sans compter la fatigue qui la rendait confuse et qui l'empêchait de réfléchir.

Bianca tendit la main pour qu'Ugo la serre et lui assura d'un sourire et d'un bref hochement de tête qu'elle n'avait rien de grave.


"Je suis désolée d'avoir gâché votre dîner..." dit-elle tout bas avec un sourire contrit.

Elle ferma les yeux quand Muzio commença à donner les explications, comme si elle ne voulait pas être confrontée à cette situation, elle ne voulait pas voir le visage de son frère à ce moment là, elle voulait être loin, et seule, sans compte à rendre à personne.

Lorsque sonna le cinglant "depuis huit mois", Bianca ne broncha pas mais serra légèrement la main de son frère.


"S'il vous plait. Dit-elle soudain en rouvrant les yeux. Il ne faut pas que cette histoire s'ébruite avant que mon époux ne l'apprenne... Je dois.. le lui annoncer moi-même et je doute de surcroît.. qu'il apprécie que mon frère ait été informé avant lui... Je dois le lui annoncer..." expliqua-t-elle en refermant les yeux sous la fatigue qui l'étreignait de plus en plus.

"Lui annoncer..." répéta-t-elle, sentant l'angoisse lui tordre l'estomac rien qu'à cette idée.

Epuisée physiquement et psychologiquement, le bouillon du médecin aidant, la princesse s'enfonça dans un sommeil lourd et profond.


(Voilà, comme ça vous pourrez sauter mon tour et parler librement entre vous deux)
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Coriolan
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MessageSujet: Re: Le Petit Salon   Le Petit Salon - Page 2 PerleDim 3 Juin - 18:07

Bianca enceinte ? Mais elle venait de lui dire qu'elle avait fermé sa porte au prince... Depuis huit mois ? Cela permettait d'écarter la thèse de l'enfant illégitime, mais alors pourquoi... pourquoi ne le savait-elle que maintenant ?

Il était heureux que le médecin ait donné ses informations rapidement. Confusion, étonnement, doute, tout était passé trop vite pour que Bianca, qui avait fermé les yeux, puisse le remarquer. Coriolano se contenta de serrer à son tour la main de sa sœur et de la prendre un peu plus dans ses bras.

Oh il comprenait parfaitement l'angoisse dans laquelle sa soeur devait se trouver. Personne ne croirait à cette histoire. Lui-même... S'il ne s'agissait pas de Bianca, s'il ne la tenait pas ainsi épuisée dans ses bras...

Elle s'était endormie et Coriolano calla la tête de sa soeur contre son épaule.


"Depuis huit mois..."

Sa voix n'était qu'un murmure, il avait peur de réveiller sa soeur s'il la timbrait.

"Mais comment est-ce possible ? Et dire que..." que la veille il avait posé la question au Prince Adorasti. Mais cela le médecin n'était pas obligé de le savoir. Il s'était comporté très étrangement avec Elio la veille. Qu'est-ce qu'on lui avait répondu ? Que si c'était le cas on le lui ferait savoir très rapidement... La situation était ironique.

"Est-ce que cela veut dire que l'enfant... Non il ne peut pas être mort. Mais est-ce qu'il serait malade ?"

Cela ne le concernait pas. La situation était désagréable. Il était bizarrement partagé entre l'ennui d'imaginer la famille Adorasti avec un héritier sain et vigoureux, et l'envie que sa soeur ait un enfant dont elle soit fière.
Et puis il y avait le médecin au milieu dont il ne comprenait plus les actions.


"Vraiment, je ne sais pas quoi faire..."


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